tué ; — je suis le frère de dona Fausta Ojeda que vous avez tuée ; — je suis le frère de dona Teresa Ojeda que vous avez tuée.
— Mon frère, dit don Juan, en s’agenouillant devant lui, je suis un misérable couvert de crimes. C’est pour les expier que je porte cet habit, et que j’ai renoncé au monde. S’il est quelque moyen d’obtenir de vous mon pardon, indiquez-le-moi. La plus rude pénitence ne m’effraiera pas, si je puis obtenir que vous ne me maudissiez pas.
Don Pedro sourit amèrement. Laissons là l’hypocrisie, seigneur de Marana ; je ne pardonne pas. Quant à mes malédictions, elles vous sont toutes acquises. Mais je suis trop impatient pour en attendre l’effet. Je porte sur moi quelque chose de plus efficace que des malédictions. —
À ces mots il jeta son manteau et montra qu’il portait sous son bras deux longues rapières de combat. Il les tira du fourreau et les planta en terre toutes les deux. Choisissez, don Juan, dit-il. On dit que vous êtes un grand spadassin, je me pique un peu d’être adroit à l’escrime. Voyons ce que vous savez faire.
Don Juan fit le signe de la croix et dit : — Mon frère, vous oubliez les vœux que j’ai prononcés. Je ne suis plus le don Juan que vous avez connu. Je suis le frère Ambroise.
— Eh bien ! frère Ambroise, vous êtes mon ennemi, et sous quelque nom que vous portiez, je vous hais, et je veux me venger de vous.
Don Juan se mit de nouveau à genoux. — Si c’est ma vie que vous voulez prendre, mon frère, elle est à vous. Châtiez-moi comme vous le désirez.
— Lâche hypocrite ! crois-tu que je suis ta dupe ? Si je voulais te tuer comme un chien enragé, me serais-je donné la peine d’apporter ces armes ? Allons ! choisis promptement et défends ta vie !
— Je vous le répète, mon frère, je ne puis combattre. Mais je puis mourir.
— Misérable ! s’écria don Pedro en fureur, on m’avait dit que tu avais du courage. Je vois que tu n’es qu’un vil poltron !
— Du courage, mon frère ! je demande à Dieu qu’il m’en donne pour ne pas m’abandonner au désespoir où me jetterait, sans son secours, le souvenir de mes crimes. Adieu, mon frère. Je me retire,