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LES ADVERSAIRES DE M. DE LA MENNAIS.

les cultes de l’Orient ; c’est un vertige bizarre, une évocation incohérente et arbitraire de certaines données de l’orientalisme.

L’auteur a pressenti quel puissant contraste opposaient au spiritualisme étroit et exclusif des chrétiens les magnificences idéales et symboliques de l’Orient où la religion embrasse à la fois la nature, la société, la science, et trouve la vérité dans l’immensité de sa formule. Mais nous prions l’auteur, s’il est jeune, comme on nous l’affirme, de renoncer, dans l’intérêt de son avenir, à ces imitations enflées et stériles du style apocalyptique, de dissiper les fumées de son imagination, de n’admettre dans sa méditation que les pensées nettes et claires, et de se servir, pour contempler le génie de l’Orient, des qualités de l’esprit occidental. Sans doute notre siècle est destiné à comparer toutes les traditions du monde, à remuer l’Inde, la Chine et l’Égypte, à confronter toutes les traductions historiques des idées éternelles ; mais dans ce vaste labeur mettons toujours la clarté à côté de la force ; portons dans tout une lumière impitoyable ; l’esprit de l’Occident doit être tranchant et acéré comme l’épée d’Alexandre.

L’homme qui pense doit aujourd’hui avoir devant les yeux l’union de l’Orient et de l’Occident aussi bien que l’union de la politique et de la théologie.

Tombent donc les représentations insuffisantes des choses, les formules fatiguées et impuissantes, les systèmes étroits, les fictions, les mensonges, les erreurs long-temps accréditées, et les méprises devenues des superstitions ! Que l’homme travaille sous l’œil de Dieu à déblayer le sol qui doit recevoir les fondemens du temple nouveau ; qu’au moins, s’il n’est pas encore heureux, il ne soit plus trompé. Dans cet œuvre qui s’accomplit de toutes parts, M. de La Mennais a pris le rôle de chrétien révolutionnaire ; il s’est offert à l’esprit nouveau avec les insignes de l’antique sacerdoce ; les cieux ont tressailli en le regardant faire, et une voix a été entendue criant du plus profond du sanctuaire divin : Il est sauvé !


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