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DE L’INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE EN FRANCE.

Le cadre dans lequel il nous est prescrit de nous renfermer ne suffirait pas à apprécier, même de la manière la plus succincte, les causes qui retardent les progrès de toutes nos industries si diverses et si variées. Nous avons, encore moins, eu la prétention d’indiquer même sommairement tous les articles qui ont paru à une exposition que l’on regarde comme la plus brillante de toutes celles qui se sont succédé. Notre but, non moins grave, a été d’appeler l’attention sur la route que poursuit notre industrie, sur les causes qui l’entravent et sur le dommage que le pays en reçoit.

Dans un grand état comme la France, la civilisation développe chaque jour des besoins nouveaux, enfans plutôt du caprice et de la mode que de la nécessité. L’industrie, laborieuse, appliquée, s’étudie à remplir ces besoins, à fournir à toutes les classes de citoyens les objets que l’époque réclame. Il en résulte une excitation de travail dont nous ne méconnaissons pas l’heureuse influence sur l’économie intérieure du pays. Ce n’est point une création méprisable que celle de cette immense quantité de valeurs échangeables qui a paru à l’exposition de 1834 en articles de modes, de toilette, de coiffures, de fantaisies diverses. Mais si l’on peut voir là quelque indice de la richesse relative de la France ou de l’aisance d’une partie de ses habitans, le cercle infiniment étroit des consommateurs, le peu de poids de ces productions dans nos rapports avec l’étranger, séparé de nos goûts par une civilisation différente, nous feront toujours regarder, avec un intérêt secondaire, cette partie de notre inventaire industriel. C’est cependant elle qui a principalement besoin de l’exposition comme d’un bazar destiné à éveiller le désir de l’acheteur, et les capitaux déplacés à cette occasion sont peut-être le seul bien réel que la circonstance ait produit. Quant à cette haute industrie manufacturière qui s’occupe des besoins généraux des peuples, de les nourrir, de les vêtir, d’aider à leur bien-être, de faciliter leurs communications, nous croyons que l’exposition lui est chose plus dommageable qu’utile.

Depuis la révolution de 1789, quarante-cinq années se sont écoulées, et une partie des souverains de l’Europe n’a encore pu pardonner à la nation française la déclaration de principes politiques qui en fut la conséquence. C’est à la lutte qui s’engagea, à cette époque déjà reculée, entre les puissances coalisées et la France, que l’on doit attribuer le développement du système qui, par degrés, a fait regarder comme une tolérance presque exorbitante l’admission du produit de l’industrie étrangère dans la consommation du pays. Les gouvernemens de la révolution et de l’empire, voyant la France chassée par la force de tous les marchés au-delà des mers, se mirent à repousser ce qui ne pouvait plus leur parvenir que de la main de leurs ennemis. La prohibition devint bientôt la règle, et l’impôt