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structions bysantines ; ce sont ces fortifications qui partent de la mer de Marmara, en s’appuyant au château des Sept-Tours, et qui se prolongent jusqu’au fond du port ; triple rangée de murailles, garnie dans ses deux pans intérieurs, de tours, la plupart octogones, et, jusqu’à cette heure, malgré sa vétusté, se maintenant ou ne s’écroulant que par lambeaux, recouverte de lierre, ombragée même d’une végétation arborescente, et montrant encore, comme une plaie qui n’a pas été fermée, la brèche où le canon fraya une route à l’islamisme. Cette ligne de remparts, aujourd’hui désarmée, et dont les fossés se changent en jardins, forme à elle seule l’un des côtés de Constantinople, et comme la base du triangle, dont les deux autres côtés regardent la mer de Marmara et le port, en se rejoignant à la pointe du sérail. À présent, dans ce vaste espace embrassons, d’un seul regard, les sept collines et autant de vallées ; ouvrons les yeux sur cette masse de maisons innombrables, variant de position selon les accidens du terrain, rouges de leur peinture et des tuiles de leurs toits, dominées par les coupoles des bains, des bazars, des mosquées, et par la troupe géante des minarets, n’offrant point de disparates désagréables à la vue, parce que la police règle l’élévation des demeures même des particuliers, peu hautes parce que chaque habitant aime à avoir sa maison à lui, et s’entre-mêlant de verdure, parce que le Turc volontiers avec lui loge quelques arbres pour ses enfans, ses femmes et lui-même ! Devant un tel panorama, on conçoit sans peine qu’un Anglais ait frété un navire pour venir uniquement jouir de ce spectacle et de celui du Bosphore ; — et qu’il soit reparti à l’instant sans mettre pied à terre, dans la crainte de gâter ses impressions, on le conçoit également. Les rues sont étroites, tortueuses, mal pavées, sales, abandonnées aux chiens errans. L’extérieur même des habitations, vue de près, n’a rien de remarquable, sinon l’avancement d’une partie des appartemens sur chacune des faces, et, par suite, une multiplicité d’angles saillans et rentrans dans la toiture. Mais, y pénétrez-vous ? c’est pour l’intérieur que le Turc a réservé tout son luxe ; avec quel art il s’entend à tous les arrangemens de la vie domestique, et sait y réunir le somptueux et le confortable ! Le Turc aime le chez-soi : il n’y a que le café