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Dante.

appuyés sur les Gibelins d’Arezzo et sur les Blancs de Pistoie, n’avaient pas laissé de poursuivre la guerre contre les Noirs de Florence soutenus par ceux de Lucques. Mais le sort avait continué à leur être contraire. — Le 27 juillet 1304, le pape Benoit xi, leur patron, était mort empoisonné, et sa mort avait été généralement regardée comme une vengeance des Noirs. — Clément v, qui lui succéda, établit le siége pontifical à Avignon, où il n’eut plus les mêmes motifs ni les mêmes moyens d’intervenir dans les événemens de la Toscane.

Encouragés par ces circonstances, les Noirs de Florence et de Lucques, qui jusque-là n’avaient fait contre leurs adversaires qu’une petite guerre d’embuscades et de châteaux, dans les parties les plus sauvages du Val d’Arno et du Mugello, avaient cru pouvoir tenter quelque chose de plus hardi. Au mois de mai 1305, ils avaient mis le siège devant Pistoie, désormais la seule ville de la Toscane où le pouvoir fût aux mains des Blancs.

À cette nouvelle, le pape Clément v avait fait partir en toute hâte pour la Toscane des légats chargés de réconcilier les factions, ou tout au moins de faire lever le siége de Pistoie. Les légats étaient venus, mais ils s’étaient laissé jouer par les Noirs, et n’avaient réussi à rien.

Clément v avait alors envoyé en Toscane, avec le titre de Pacier, un second légat, supposé plus habile que les premiers, le cardinal Napoléon des Ursins. Mais ce légat n’avait pas été plus heureux que les autres : Pistoie avait été, en quelque sorte, prise sous ses yeux, et les Noirs de Florence n’avaient pas voulu entendre parler de réconciliation. Le cardinal s’était retiré à Bologne, d’où il avait été presque aussitôt chassé par les intrigues des Florentins. Il avait alors passé en Romagne, d’où il avait excommunié tous les Noirs. Enfin, l’excommunication n’aboutissant à rien, il s’était rendu, au mois d’avril 1307, à Arezzo, pour y lever des forces, et faire la guerre à Florence.

Les Blancs-Gibelins furent les premiers à se joindre à lui, et ce fut pour s’y joindre avec eux, que Dante consentit à reprendre parmi eux son ancien poste de conseiller et de meneur.

L’armée réunie par le cardinal des Ursins, contre les noirs de Florence et de Lucques, était forte en nombre et ne manquait ni de courage ni d’ardeur ; mais elle fut si mal et si mollement conduite, qu’elle se dispersa sans avoir rien fait, ni pour le pape, ni pour aucune des factions qui s’y étaient passagèrement groupées. Dante, voyant ses nouvelles espérances trompées, abandonna de nouveau les Blancs-Gibelins et se remit à l’écart. Avant la fin de 1307, il était de retour dans la Lunisiane, où le marquis Morello Malespina lui donna l’hospitalité.

Les Malespina, seigneurs de toute cette belle vallée de la Macra, étaient