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L’ARÉTIN.

pourrait appeler la Science des cours. Je retrouve dans la Courtisane le premier type de Pourceaugnac. Le Pourceaugnac italien, qui est de Sienne, et que l’on appelle messire Maco, arrive à Rome avec la ferme résolution d’être cardinal, comme son père en a fait le vœu. Il rencontre un fat napolitain, messire Parabolano : tous deux se vantent, l’un des succès futurs de son ambition, l’autre de ses bonnes fortunes. Parabolano fait sa cour à une jeune fille qu’il compare à la lune et aux étoiles, et qui, lui donnant un rendez-vous, trouve moyen de se faire remplacer par une vieille courtisane de soixante ans.

Messire Maco, de son côté, rencontre un intrigant nommé André, qui se charge de lui apprendre le métier de courtisan, et de le faire cardinal. « Savez-vous mentir, blasphémer, jouer ? Savez-vous être curieux, flatteur, hérétique, hâbleur, médisant, ingrat, ignorant ? Vous serez cardinal. » Il le met ensuite entre les mains d’un médecin nommé M. Mercure, qui, pour le disposer au cardinalat, lui fait prendre des pilules et le plonge dans une étuve remplie de vices, qu’il appelle le moule des cardinaux. Les deux dupes s’aperçoivent qu’on s’est moqué d’eux, se consolent l’un l’autre, et la pièce finit sans dénouement.


Voici le prologue de cette satire dramatique :


L’étranger. — Pardieu ! cet endroit ressemble à l’ame du grand-duc de Lève ; il semble préparé à quelque chose de grand. Quelle fête splendide y aura donc lieu ? Il faut que je le demande à ce gentilhomme qui passe : « Holà ! Messire, m’obligerez-vous de m’apprendre pourquoi tout ce pompeux appareil ? »

Le gentilhomme. — C’est que l’on va jouer ici tout-à-l’heure une comédie nouvelle.

L’étranger. — Qui l’a composée ? la divine marquise de Pescaire ?

Le gentilhomme. — Non ; sa plume céleste est tout occupée à faire à son mari une niche parmi les bienheureux.

L’étranger. — Est-elle de l’Arioste ?

Le gentilhomme. — Hélas ! l’Arioste est parti pour le ciel, n’ayant plus besoin de gloire sur la terre.

L’étranger. — Calamité pour le monde que ce grand homme soit mort ! C’était la bonté même.

Le gentilhomme. — Que n’était-il la méchanceté même !