Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 1.djvu/366

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
362
REVUE DES DEUX MONDES.

Une larme sur chaque corde,
Et des frissons sur tous tes doigts !

À ces vains jeux de l’harmonie
Disons ensemble un long adieu :
Pour sécher les pleurs du génie,
Que peut la lyre ?… Il faut un Dieu !


En publiant, il y a trois ans (1833), la cinquième édition de ses premières poésies, Mme Tastu y ajoutait une préface en vers qui est une de ses meilleures pièces. Elle semble y douter pour ses premiers nés de l’accueil qui les a favorisés jusques-là ; cette révolution qui a renouvelé et surtout dispersé tant de choses, qui a dissous les groupes poétiques et littéraires, lui paraît avoir de beaucoup vieilli ses vers si heureux à leur naissance :


Hélas ! combien sont morts de ceux qui m’ont aimée !
Combien d’autres pour moi le temps aura changés !
Je n’en murmure pas ; j’ai tant changé moi-même.
.................
......... Il est des sympathies
Qui, muettes un jour, cessent d’être senties ;
Et tel par qui jadis ces chants étaient fêtés,
À peine s’avouera qu’il les ait écoutés !


Il a été fait à cette préface craintive une réponse en vers que nous donnons ici, malgré tout ce qu’il y a de périlleux à rien produire sur un sujet touché par M. de Lamartine ; mais il sera le premier à nous pardonner en faveur du sentiment commun qui nous attire vers la même noble douleur. Voici donc cette réponse :


Non, tous n’ont pas changé, tous n’ont pas, dans leur route,
Vu fuir ton frais buisson au nid mélodieux ;
Tous ne sont pas si loin ; j’en sais un qui t’écoute
Et qui te suit des yeux.

Va ! plusieurs sont ainsi, plusieurs, je le veux croire,
De ceux qu’autour de toi charmaient tes anciens vers,