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avait, par sa conduite indépendante, gêné les mesures de la maison d’Autriche à l’égard de quelques cantons helvétiques ; M. de Rumigny sera rappelé : loin de s’opposer à l’esprit et à la tendance des notes autrichiennes au Worort, on les secondera par une commune action. Quelle barrière pourrait encore séparer l’Autriche et la France, après de si nobles concessions, après tant de généreux sacrifices ? Le Journal des Débats, qui avait fulminé tant d’articles menaçans pour soutenir la politique de M. de Rumigny, en sera pour ses frais d’érudition diplomatique ; on le désavouera, et M. Bourqueney, l’éditeur responsable de toute cette belle politique sentimentale, s’exilera comme premier secrétaire d’ambassade à Londres, avec M. Sébastiani.

C’est cette bienveillance vis-à-vis de l’Autriche, de l’Angleterre et de la Russie, que M. Pozzo di Borgo a mission de contrarier à Londres ; c’est pour qu’il allât endormir le duc de Wellington et le prince Esterhazy au bruit des menaces révolutionnaires, que l’empereur Nicolas lui a fait quitter en toute hâte son ambassade de Paris. Dans ces conférences, la Russie va protester encore de son désintéressement ; singulier désintéressement en effet, qui lui permet, chaque quart de siècle, d’agrandir son vaste territoire de nouveaux empires. M. Pozzo niera donc toute idée d’ambition de la part de son gouvernement : si la Russie s’immisce dans les affaires de la Perse, c’est pour ramener l’ordre et la paix dans les provinces déchirées par la guerre civile, de même qu’elle est allée à Constantinople pour prêter appui à la légitimité du sultan ! Sous ce rapport, le cabinet de Saint-Pétersbourg est d’une bien incontestable habileté ; il s’étend au Midi et s’étend au Nord, en invoquant toujours sa générosité chrétienne et sa magnanimité.

La conférence de Londres n’aura point de caractère officiel comme celle que présidait M. de Talleyrand ; il n’y aura pas non plus de protocoles. Les protocoles sont usés et hors de mode ; seulement, on prendra des résolutions communes par rapport à l’Espagne et à la Belgique. Quant au Portugal, les tories ne veulent pas souffrir qu’aucune puissance se mêle des affaires d’un pays qu’ils considèrent et qu’ils traitent comme une véritable colonie anglaise. Si la fuite de don Miguel le ramène à bon port dans son ci-devant royaume, les tories ne feront rien, ni pour le soutenir, ni pour le renvoyer ; ils n’ont pas plus de prédilection pour le gouvernement de dona Maria que pour celui de don Miguel ; ce qu’ils veulent, c’est un système assez souple pour que l’Angleterre puisse régner en maîtresse à Lisbonne et à Porto, et, sous ce rapport, ils préféreront toujours la régence et dona Maria, parce que, moins capricieuse que l’autorité des-