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ANDRÉ.

ginant que c’était une chose toute simple que de venir vous offrir ces fleurs. L’impertinente personne qui sort d’ici m’a fait sentir mon tort ; me le pardonnerez-vous ?

— Oui, monsieur, répondit Geneviève, s’il est vrai que vous n’en ayez pas prévu les suites, et si vous me promettez de ne pas m’y exposer une seconde fois.

— J’aimerais mieux renoncer au bonheur de vous revoir jamais que de vous causer une contrariété, répondit André ; et, laissant son bouquet sur la table, il se leva tristement pour se retirer ; mais une larme vint au bord de sa paupière, et Geneviève, qui s’en aperçut, se troubla à son tour.

— Au moins, lui dit-elle avec douceur, je ne vous chasse pas, et puisque vous n’avez eu que de bonnes intentions aujourd’hui, je vous remercie de votre bouquet.

En même temps, elle le prit et l’examina. André s’arrêta, et resta debout et incertain.

— Il est bien joli, dit Geneviève. Comment appelez-vous ces fleurs roses si rondes et si petites ?

— Ce sont des hépatiques, répondit-il en se rapprochant ; voici des belles de nuit à odeur de vanille, de la giroflée-mahon blanche, et des mauves couleur de rose.

— Oh ! celles-là se fanent vite, dit Geneviève. Je vais les mettre dans l’eau.

Elle délia le bouquet et le mit dans un vase plein d’eau fraîche, en arrangeant chaque fleur avec soin. Pendant ce temps, André examinait les cartons ouverts et admirait la perfection des ouvrages de Geneviève. Cependant il lui échappa une exclamation de blâme qui faillit faire tomber le vase de fleurs des mains de la jeune fille.

— Qu’est-ce donc ? s’écria-t-elle.

— Ô ciel ! répondit André, des fuxias à calice vert. Cela n’existe pas. C’est une invention gratuite.

— Hélas ! vous avez raison, dit Geneviève en rougissant, ce n’est pas ma faute. Une demoiselle de la ville, pour qui j’ai fait cette branche de fuxia, l’a voulu ainsi. En vain je lui ai montré l’original ; elle s’est obstinée à trouver ce bouquet trop rouge. Feuilles, tiges, fleurs, tout, disait-elle, était de la même teinte. Elle m’a