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HOMMES POLITIQUES DE LA BELGIQUE.

et la considération résument ce que la Belgique a de plus respecté et de plus influent. Je veux parler des Mérode, des Robiano et des Vilain xiv. Ces familles sont le foyer de concentration des pures doctrines de l’aristocratie catholique. La domination hollandaise ne trouva pas d’ennemis plus acharnés ; mais après la victoire, la plupart de leurs membres ne prirent plus la peine de cacher leur aversion pour le principe qui les avait fait triompher, c’est-à-dire pour les libertés du pays.

Les avis sont cependant partagés sur l’arrière-pensée que l’on suppose à M. le comte Félix de Mérode, ministre d’état et frère du jeune Frédéric, blessé à mort en combattant contre les troupes de Guillaume. M. Félix de Mérode fait publiquement profession de vouloir la liberté en tout et pour tous, mais la position qu’il occupe dans son parti, et l’intimité qui l’unit à l’archevêque de Malines, sont de nature à faire douter de sa sincérité politique. Sa vie privée est des plus honorables, et ses adversaires s’accordent à reconnaître qu’aucune de ses actions ne fut jamais dictée par l’intérêt personnel. L’estime dont il jouit est si haute et si entière, qu’en 1830, avant qu’il fût question d’offrir la couronne de Belgique au duc de Nemours, il fut porté comme candidat à la royauté. L’antique souche de sa maison, dont l’aîné porte le titre de prince de Rubempré, rendait peut-être moins ridicules les projets de grandeur que ses partisans avaient conçus pour lui. Le souverain manqué se borna à participer au gouvernement des affaires en acceptant le portefeuille de l’extérieur, puis celui de la guerre par intérim. Il siége maintenant au conseil comme ministre sans portefeuille. Ses deux frères eurent encore moins d’ambition. L’aîné se contenta d’un fauteuil au sénat, et le cadet, dans la curée des places, n’en voulut prendre une que sur les bancs de la chambre des représentans. Plût à Dieu que tous les fervens catholiques eussent poussé aussi loin l’abnégation et le mépris des biens terrestres !

L’aîné de la famille de Robiano, le comte François, ancien chambellan du roi de Hollande et aujourd’hui sénateur belge, le seul qui, parmi ses paisibles collègues, se laisse aller quelquefois à des velléités d’opposition, fait tache dans l’unité catholique et absolutiste de sa lignée. C’est un gracieux conteur d’anecdotes.