portée contre Luther, il s’adressa à l’électeur de Saxe et lui manda qu’invité, à plusieurs reprises, par le nonce du pape, à faire brûler les livres du docteur Martin Luther dans toute l’étendue du Saint-Empire, il en avait déjà donné l’ordre dans ses pays héréditaires de Bourgogne. Mais il ajouta qu’en sa considération il voulait entendre Luther avant de procéder contre lui, et il l’engagea à le conduire à la diète de Worms pour y être examiné.
L’électeur désira connaître les dispositions de Luther et savoir si l’exemple de Jean Huss ne l’empêcherait pas d’obéir à cette périlleuse citation. Spalatin, son secrétaire intime, lui écrivit donc pour lui demander s’il se rendrait à Worms sur l’ordre de l’empereur. Luther lui répondit, le 21 décembre 1520 :
« J’irai à Worms si j’y suis appelé, fussé-je même malade. Si l’on veut employer contre moi la violence, comme le ferait croire cette citation, j’abandonnerai l’affaire à la direction de Dieu. Il vit et il règne encore, celui qui a conservé les trois jeunes gens dans la fournaise ardente. S’il ne veut pas me conserver, ma vie est peu de chose. D’ailleurs, il n’est question ici ni de ce que j’ai à craindre, ni de ce qui me convient : il s’agit de l’Évangile. Il ne faut pas que nos adversaires trouvent l’occasion de dire que nous n’osons pas confesser ce que nous enseignons, et que nous craignons de verser notre sang pour notre foi. Je ne sais, du reste, ce qui, de ma vie ou de ma mort, sera plus avantageux à la cause de l’Évangile et du bien public.
« Je souhaite seulement et je prie Dieu que l’empereur Charles ne tache point de mon sang le commencement de son règne. J’aurais mieux aimé, comme je l’ai dit souvent, périr par les mains seules des Romains, et ne pas le voir mêlé dans cette affaire. Vous savez quelles misères ont accablé l’empereur Sigismond après avoir fait mourir Jean Huss. Il n’a plus eu de bonheur ; il est mort sans héritiers ; son petit-fils Ladislas a péri ; son nom s’est éteint en une seule génération ; sa femme est devenue la honte de son sexe et de toutes les reines. Mais, quand il serait arrêté que je dois être livré non-seulement aux pontifes, mais aux rois, que la volonté de Dieu s’accomplisse. Maintenant, vous savez mon dessein et vous connaissez mon cœur ; attendez tout de moi, excepté la fuite ou la