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SESSION PARLEMENTAIRE.

diquée au roi ; son crédit en reçut une rude atteinte ; la chambre comprit que son président ne dirigeait pas un parti organisé, professant hautement une théorie gouvernementale, mais une coterie d’hommes qui n’osaient ni prendre le pouvoir, ni le soutenir. Dès ce moment, un grand nombre de ces unités honorables des centres dont nous avons parlé plus haut, qui, à l’origine, avaient secondé le parti Dupin, s’en séparèrent ; presque toutes passèrent au camp ministériel, et pour constater ce résultat, l’ancien cabinet, qui s’était reconstitué sous la présidence du maréchal Mortier, avança la convocation de la chambre, qui fut fixée au 1er décembre. Alors la querelle s’engagea encore nettement. L’adresse restait comme une arme au tiers-parti, c’était le programme sur lequel il s’appuyait pour défendre ses prétentions et faire parade de ses forces. Le ministère demanda hautement que cette adresse fût interprétée, que la chambre déclarât si elle adhérait au système du cabinet, ou si elle le blâmait ; après quelques explications obscures, un vote de confiance fut donné au ministère. La même majorité qui avait voté l’adresse donna ses suffrages dans un sens opposé ; on cria à la contradiction, et pourtant ce vote est facile à expliquer. Avant novembre, le tiers-parti était une espérance ; dès-lors il n’était plus qu’une puissance déchue. Les votes flottans étaient allés se grouper là où ils avaient trouvé des doctrines et un abri. C’est la conséquence de toute position nette en face d’un parti qui n’ose se dessiner. Les doctrinaires marchaient haut à la victoire ; ils devaient l’obtenir.

On a parlé souvent de corruption, de ces transactions secrètes qu’emploient les gouvernemens pour entraîner les majorités à leur aide ; on a dit que la chambre actuelle était corrompue. Nous ne partageons pas cette opinion ; la chambre est seulement préoccupée, c’est-à-dire qu’elle est sous l’empire de fausses idées, de craintes exagérées, sous l’empire d’une ignorance complète des affaires d’administration surtout ; et c’est là un mal plus grand peut-être, car, avec la corruption intelligente, il y a des ressources ; il n’y en a pas avec la peur. La majorité a étouffé tous ces instincts qui, dans l’esprit de l’homme, lui font discerner le juste de l’injuste, le droit d’avec ce qui ne l’est pas ; elle se dit : « Il y a une minorité de républicains ; il faut nous défendre contre elle, c’est de là que peut venir le danger. Nous avons subi des émeutes, nous craignons le désordre ; donc toutes les lois sévères sont bonnes, il faut aider le gouvernement de toutes les manières ; on ne peut rien lui refuser sans menacer la sécurité publique. » Dès-lors, la majorité se passionna contre ses adversaires ; au besoin, elle les proscrirait. Des préoccupations à peu près semblables dominèrent la majorité de M. de Villèle. Cette majorité des 300