taires de la protestation des défenseurs ; mais, se fondant sur un classique exemple, il s’est dit sans doute : Amicus Plato, sed magis amica veritas. En conséquence, il a eu l’honneur de proposer la mise en accusation des défenseurs et des gérans de journaux qui ont inséré la protestation du 11. Dans l’assemblée dont nous parlons, on se prononça tout d’une voix pour la proposition de M. Cousin.
Il s’agissait de la faire agréer à la chambre des pairs. M. Cousin, ne se souciant pas d’attacher le grelot, avisa son ancien élève, M. le duc de Montebello, qu’il faut se garder de confondre avec son frère, M. Alfred de Montebello, jeune homme spirituel, qui a figuré pendant une année dans l’opposition modérée de la chambre des députés. M. de Montebello, qui arrive de Stockholm, où son ton tranchant lui a fait peu d’amis, ne pouvait que gagner une plus importante ambassade en prenant sur lui la responsabilité des idées politiques de son ancien pédagogue. On convint qu’il serait soutenu par tous les hommes de l’empire, et que le général Lallemand, l’un des grand’croix de la Légion-d’honneur nommés le 1er mai, ferait auprès de lui les fonctions de chef d’état-major. On a vu les résultats de cette proposition. Comme tout se prépare de longue main à la chambre des pairs, il a été question, dès le premier jour, de la pénalité qu’on infligerait aux nouveaux accusés. On a parlé de 10,000 francs d’amende, sans compter l’emprisonnement. Quatre-vingt-onze signataires sont cités, plus dix gérans de journaux environ ; ce qui procurerait au fisc un bénéfice d’un million. Ce serait autant de trouvé sur la grosse amende de vingt-cinq millions que nous a infligée l’Amérique.
Nous voyons avec douleur la pairie se jeter si aveuglément dans cette voie, et se laisser entraîner par ses membres les plus violens et les moins indépendans, à de telles mesures. Il semble que cette assemblée, dont la majorité se compose de vieillards, et où devraient dominer la modération et la prudence, soit livrée à une fougue de jeunesse. On en est à se demander ce qu’elle a fait de ses lumières et de son expérience. Que voulait-elle en privant si induement les accusés de leurs défenseurs ? Se dispenser d’entendre les discours un peu vifs et hardis qu’elle attendait de M. Carrel, de l’abbé de La Mennais, de M. de Cormenin et de quelques autres ? Et voilà qu’elle les amène par la main à sa barre dans l’intérêt de leur propre défense, avec de nouveaux griefs et de nouveaux motifs d’irritation. Nous savons que la cour des pairs est de force à tout entendre, et que son existence ne dépend pas de l’effet de ces plaidoiries ; mais il faut être logique : si elle voulait repousser ce calice, nous ne voyons pas pourquoi elle se décide tout à coup à le boire. Elle craignait le scandale, et elle le fait naître maintenant. Or donc, puisqu’elle le veut, elle en-