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REVUE DES DEUX MONDES.

L’ouvrier qui bêchait et roulait sa brouette,
La quitte ; le travail, les pelles, tout s’arrête.
On n’entend plus au loin qu’un murmure léger,
Que le cri d’un ânon, le sifflet d’un berger,
Ou derrière un fronton renversé sur la terre,
Quatre forts mendians couchés avec mystère,
Qui, les cinq doigts tendus, et du feu dans les yeux,
Disputent sourdement des baïoques entre eux.


Ici la peinture est toujours un peu crue, mais elle est parfaitement vraie de dessin et de couleur, et c’est par cette vue du Forum au coucher du soleil que nous terminerons notre promenade à travers l’immense galerie que nous avons parcourue. Que le lecteur se rappelle combien sont variés la composition, le faire, le cadre de ces nombreux tableaux, et cette pensée le rendra peut-être indulgent pour le cicerone qui lui a servi de guide.

Pour m’acquitter de ma tâche, il m’a fallu toucher en passant bien des questions, depuis l’établissement du christianisme jusqu’à la révolution de 1830. J’ai été forcé d’être rapide, et j’espère que, dans les jugemens qu’on pourra porter sur mes jugemens, on tiendra compte de cette rapidité forcée, qui m’a souvent interdit les développemens, les preuves ou les restrictions.

Je sais qu’il y a dans mon travail des omissions et des lacunes : il était impossible de parler de tous ceux qui ont parlé de Rome, mais je crois n’avoir omis aucun type important. D’ailleurs, je crains peu qu’on m’accuse d’avoir été trop court ; je redoute plus le reproche contraire. À ceux qui me l’adresseraient, je répondrais que l’on ne quitte pas Rome comme on veut, surtout quand on y rencontre tous les grands hommes qui l’ont visitée ; que je me plaisais trop à vivre dans ce lieu, en si bonne compagnie, pour être pressé d’en sortir ; que ce moment est pour moi comme un autre départ, et qu’en finissant je suis tenté de m’écrier avec Rutilius : Je cède, je m’arrache aux embrassemens de la ville bien-aimée ; mes pieds franchissent à regret le seuil sacré :


Laxatus tandem caræ complexibus urbis,
Inviti superant limina sacra pedes.


J. J. Ampère.