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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 3.djvu/733

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TALLEMANT DES RÉAUX.

renommée d’un pays ; mais les littérateurs du second ordre s’effacent et disparaissent dans les rayons de gloire qui environnent les grandes illustrations. C’est précisément à ces réputations secondaires que Tallemant s’est le plus attaché ; Voiture et Balzac, Gombauld et Costar, Conrart et Sarrasin, Mlles de Gournay, de Scudéry et des Jardins, des Yvetaux et Colletet, Racan, Boisrobert, Bautru, le ridicule Neuf-Germain, Chapelain, Conrart, et tant d’autres devront à Tallemant d’être mieux connus et mieux appréciés ; et quoique nous soyons nécessairement suspects de quelque partialité pour l’écrivain que nous faisons les premiers connaître, nous croyons pouvoir affirmer qu’à l’avenir il faudra consulter des Réaux quand on voudra descendre dans les détails privés, et souvent minutieux, de la vie des hommes de lettres dont il parle dans ses Historiettes.

Il ne faut pas s’arrêter, comme on l’a fait dans quelques articles de journaux, à ce que dit Tallemant de Blaise Pascal, et de ce garçon de belles-lettres et qui fait des vers, nommé La Fontaine. Au moment où Tallemant écrivait, en 1657 ou 1658, les Lettres à un provincial venaient de paraître successivement sous le nom de Louis de Montalte, mais l’auteur en était demeuré inconnu. Quant à La Fontaine, aucune fable n’avait encore révélé son génie.

Nous ne possédons au reste de Tallemant que l’ouvrage qu’il n’avait pas destiné à voir le jour ; c’est l’Album, auquel il confiait ses souvenirs de toute nature, aussi bien ceux qu’il racontait inter pocula, que ceux par lesquels il jetait d’agréables distractions dans un cercle choisi ; ses Historiettes sont en quelque sorte l’ament meminisse, qu’il destinait à égayer ses vieux jours. C’était aux Mémoires de la régence d’Anne d’Autriche que Tallemant attachait le plus d’importance ; il y renvoie fréquemment dans ses Historiettes ; c’est là qu’il se proposait de tracer l’histoire de son temps ; il n’a malheureusement pas mis la dernière main à cet ouvrage ; il est même douteux qu’il l’ait jamais composé.

On voit, par l’Introduction des Historiettes, qu’en 1657, quand Tallemant se mit à les écrire, il avait seulement formé le projet de composer des mémoires plus importans : « Je renverrai souvent, dit-il, aux mémoires que je prétends faire de la régence d’Anne d’Autriche, ou, pour mieux dire, de l’administration du cardinal