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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 4.djvu/307

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LE CHANDELIER.

JACQUELINE.

Oui, voyez-vous, j’avais eu d’abord l’idée de vous faire venir ; mais j’ai réfléchi, c’est une folie ; je vous ai trop vite écouté. Mettez-vous donc au piano, et chantez-moi votre romance.

FORTUNIO.

Excusez-moi, je ne saurais maintenant.

JACQUELINE.

Et pourquoi donc ? Êtes-vous souffrant, ou si c’est un méchant caprice ? J’ai presque envie de vouloir que vous chantiez, bon gré mal gré. Est-ce que je n’ai pas quelque droit de seigneur sur cette feuille de papier-là ? (Elle place la chanson sur le piano.)

FORTUNIO.

Ce n’est pas mauvaise volonté ; je ne puis rester plus long-temps, et maître André a besoin de moi.

JACQUELINE.

Il me plaît assez que vous soyez grondé ; asseyez-vous là et chantez.

FORTUNIO.

Si vous l’exigez, j’obéis.

(Il s’assied.)
JACQUELINE.

Eh bien ! à quoi pensez-vous donc ? Est-ce que vous attendez qu’on vienne ?

FORTUNIO.

Je souffre ; ne me retenez pas.

JACQUELINE.

Chantez d’abord, nous verrons ensuite si vous souffrez et si je vous retiens. Chantez, vous dis-je, je le veux. Vous ne chantez pas ? Eh bien ! que fait-il donc ? Allons, voyons, si vous chantez, je vous donnerai le bout de ma mitaine.

FORTUNIO.

Tenez, Jacqueline, écoutez-moi. Vous auriez mieux fait de me le dire, et j’aurais consenti à tout.

JACQUELINE.

Qu’est-ce que vous dites ? de quoi parlez-vous ?

FORTUNIO.

Oui, vous auriez mieux fait de me le dire ; oui, devant Dieu, j’aurais tout fait pour vous.

JACQUELINE.

Tout fait pour moi ? Qu’entendez-vous par là ?