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Page:Revue des Deux Mondes - 1835 - tome 4.djvu/502

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REVUE DES DEUX MONDES.

tient toute la plaine ; les oiseaux ont beau s’envoler, ils retombent toujours dans ses mailles.

Au mois de janvier nous entendrons une partition nouvelle que M. Auber a écrite pour Mme Damoreau, et qu’il retire à l’Académie royale de Musique pour en doter l’Opéra-Comique, où se réfugie sa cantatrice favorite. La fortune de M. Auber est fatalement liée à la fortune de Mme Damoreau. La voix de Mme Damoreau convient à la musique de M. Auber, comme les roulades de Mme Casimir conviennent aux ariettes de M. Adam. Mme Damoreau est la cantatrice de l’auteur du Philtre et du Serment, comme M. Scribe est son poète ; ces trois talens gracieux et fins s’associent à merveille. C’est partout la même grace, la même coquetterie, la même profusion de détails et d’ornemens ; mais aussi la même recherche, le même manque absolu de vérité, de fond et de sentiment. Avec la faveur dont jouit en France, auprès du plus grand nombre, ce mélange bizarre de musique et de prose mal rimée, qu’on appelle un opéra-comique, nul doute que le théâtre de la Bourse, s’il tient les promesses de son programme, ne devienne bientôt une puissance rivale de l’Académie royale de Musique.

En attendant ces jours glorieux qui doivent amener des destinées meilleures, l’administration prépare avec activité la mise en scène de Mathilde, poème lyrique en quatre actes, dont M. Mélesville a, dit-on, emprunté l’idée première à un conte florentin publié autrefois dans la Revue de Paris. Ici, comme dans Zampa, c’est encore une morte qui revient. Mathilde est une sœur d’Alice Manfredi. M. Mélesville rêve la réhabilitation du drame fantastique sur la scène du théâtre de la Bourse. À tout prendre, c’est peut-être là une œuvre sociale comme une autre, et qu’il a dignement commencée en refaisant Don Juan. Pour la composition générale du plan, l’invention des caractères, l’originalité des effets, la variété pittoresque des moindres détails, M. Mélesville se place, sans contredit, à côté d’Hoffman. Il y a bien des gens qui prétendent que M. Mélesville, élevé à l’école poétique du Gymnase, donne çà et là des entorses à la langue française. Il n’a pas toujours le style élégant et correct du merveilleux auteur du Pot d’Or. Mais qu’importe cela ? M. Mélesville possède à un plus haut degré que Hoffman l’entente de la scène et la combinaison des