ter la question de territoire qu’après deux, trois, quatre ans de calme, de sage liberté. Tout le discours de M. Thiers fut de ce ton ; vous voyez qu’il ajournait avec beaucoup de résignation ses projets de conquête sur le Rhin. Il est vrai que M. Périer n’aurait pas entendu de cette oreille.
Le nouveau député monta souvent depuis à la tribune où il fut l’apôtre de la paix, appuyant toujours ses discours des paroles et des actes de Napoléon, et donnant souvent de rudes entorses à l’histoire. Je ne finirais pas si je voulais énumérer toutes les inexactitudes qui lui échappèrent pendant cette session ; je n’en citerai qu’une seule. Un jour, c’était le 21 septembre, M. Thiers ayant épuisé ses argumens contre la guerre dont personne ne voulait plus que lui, s’avisa de dire qu’on ne pouvait soutenir la guerre contre l’étranger sans élever au dedans des échafauds, et recommencer le régime de 95. C’était là sa thèse favorite depuis quelque temps ; et il ne s’inquiétait guère de ceux qui se demandaient si 1814 et 1815 avaient vu s’élever des échafauds quand il avait fallu défendre la France. — Quand la guerre fut déclarée, s’écria M. Thiers, quand la révolution française, cette révolution dont chacun de nous admire les grands résultats, commença ses guerres, ce fut après le 10 août ; ce fut seulement quand la famille royale était au temple, que les Prussiens marchèrent sur Paris. Voulez-vous employer les mêmes moyens de vous défendre ? — Malheureusement, M. Thiers avait mieux appris aux autres l’histoire de la révolution qu’il ne la savait lui-même, et il eut beau opposer d’opiniâtres dénégations à M. de Lafayette, le vieux héros de la révolution lui prouva, son livre à la main, que le renvoi de M. de Chauvelin, ambassadeur à Londres, avait été antérieur au 10 août, et que le manifeste du duc de Brunswick, ainsi que le traité de Pilnitz, avaient précédé de long-temps l’établissement des mesures révolutionnaires. M. de Lafayette ne s’en tint pas là, et lui fit cette admirable réponse : La nation qu’il avait fallu pousser à la défense du territoire par les terribles et sanguinaires mesures que M. Thiers et ses amis nommaient des crimes nécessaires, disait-il, était le produit de l’éducation de l’ancien régime, et la nation actuelle était bien différente de celle-là. — Pour moi, disait le vieux général, je repousse de toutes mes forces cette idée, que dans le