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dans quelle position il trouva la monarchie autrichienne. Les populations étaient épuisées par l’invasion et la guerre, le trésor sans ressources, accablé sous les contributions de la France. Le traité de Presbourg avait privé cette monarchie de toute influence sur l’Allemagne ; le traité de Vienne lui avait ôté les derniers débris de sa puissance méridionale. À ses côtés était la confédération du Rhin, c’est-à-dire Napoléon ; en face d’elle la confédération helvétique, c’est-à-dire Napoléon ; au midi le royaume d’Italie, c’est-à-dire Napoléon. Toute résistance était impuissante, il fallait donc revenir encore une fois à cette alliance intime du traité de 1756, qui, à l’origine, avait fait la base de la politique de M. de Metternich.

Dès le retour de Napoléon à Paris, le cabinet autrichien avait su par ses émissaires et par son nouvel ambassadeur, le prince de Schwartzenberg, que Napoléon avait résolu de divorcer avec Joséphine, et que dès-lors sa pensée allait naturellement se porter vers une alliance avec une des grandes puissances de l’Europe. Si l’empereur choisissait parmi les grandes duchesses russes, c’était la perte inévitable de la maison d’Autriche, car au fond se trouvait là l’accomplissement de la pensée d’Erfurt, c’est-à-dire la formation de deux grands empires, autour desquels viendraient graviter de petites souverainetés intermédiaires ; et c’est à cet état d’avilissement que serait réduite la maison d’Autriche. Si au contraire on pouvait préparer le mariage de Napoléon avec une archiduchesse, cette antique maison trouverait dans l’empereur des Français un protecteur réel, et l’influence d’une jeune épouse pourrait adoucir les rigueurs que la victoire avait imposées à la monarchie autrichienne.

Alors arrivait à Vienne le comte Louis de Narbonne, ce spirituel courtisan qui, à son retour de Trieste à Paris, fut chargé de pressentir M. de Metternich sur ce projet de mariage, qui entrait si admirablement dans les intérêts autrichiens. Nous ne parlerons pas des actes officiels qui préparèrent l’hymen de 1810 ; ils sont connus. Il suffit de bien établir ici que la pensée du nouveau chancelier d’état, en préparant l’union d’une archiduchesse avec Napoléon, fut de reconquérir, par une alliance de famille, ce que la guerre avait ôté à la maison d’Autriche. Tous les actes subséquens, jusqu’à la retraite de Moscou, sont la suite invariable de cette politique de l’alliance.

Ces actes se révélèrent bientôt. Au commencement de 1811, des indices certains signalèrent au cabinet de Vienne que des mécontentemens allaient éclater entre la France et la Russie. Le comte Otto, ambassadeur de France à Vienne, s’ouvrit tout-à-fait à M. de Metter-