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L’auteur, partant de ce principe que l’état doit mettre à la portée de tous les citoyens l’instruction qui leur est indispensable, divise l’enseignement en général ou nécessaire à chaque citoyen sans exception, et en professionnel ; c’est-à-dire spécial aux professions diverses.

L’enseignement général est primaire ou supérieur, et, sous cette dernière dénomination, il devrait comprendre deux sciences nécessaires à tout individu comme être vivant et comme citoyen, l’hygiène et le droit public. On atteindrait le but de rendre cette instruction commune à tous, en attachant à chacune des écoles secondaires, conduisant aux diverses professions, une chaire d’hygiène, et une de droit public.

Quant à l’enseignement professionnel, il n’existe jusqu’à ce jour que pour les professions libérales. Reste donc à le constituer pour la carrière industrielle et commerciale et pour l’agriculture.

L’enseignement professionnel libéral existant seul, tout le monde s’y porte, et il en résulte qu’il conduit trop de jeunes gens aux professions auxquelles il aboutit ; qu’il les y prépare pour la plupart incomplètement et par de mauvaises études ; qu’il y attire nombre d’individus à qui elles ne conviennent, ni sous le rapport de leurs moyens de fortune, ni sous celui de leur capacité, et qui, par cette éducation manquée, deviennent impropres à toute autre carrière.

Supposez, au contraire, les colléges communaux supprimés, et les colléges royaux portés au nombre de quatre-vingt-six, et à côté de ceux-ci quatre-vingt-six écoles industrielles ou commerciales et autant d’écoles agricoles, tout changerait. L’industrie et l’agriculture en recevraient une puissante impulsion ; les capacités modestes se tourneraient vers leurs études, et le professorat de ces branches de la science offrirait à beaucoup de capacités ambitieuses un débouché aussi utile que séduisant pour l’amour-propre. Mais, jusqu’à ce jour, à peine quelques institutions de ce genre ont été fondées isolément et sur un plan qui n’est pas assez large pour devenir général. Cet enseignement naissant attend une organisation systématique, et doit relever de l’université.

Tel est le sommaire des idées de M. Collard. Nous ne pouvons le suivre ni dans les considérations ni dans les calculs statistiques dont il les appuie. Disons seulement que si elles étaient mises en pratique, la France, en augmentant les frais de l’enseignement national de deux millions et demi, ne lui consacrerait encore qu’une somme presque de moitié inférieure à celle que lui consacre la Prusse.

Cet écrit prouve combien les idées progressives envahissent irrésistiblement tous les esprits, et percent à travers les préoccupations politiques qui leur sont le plus contraires ; car son auteur est plein de dévotion au juste-milieu et aux doctrinaires. Il cite l’agronome Bugeaud ; il croit