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Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 6.djvu/375

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REVUE. — CHRONIQUE.

ouvrage, qui ne tardera pas, sans doute à paraître, car M. Capefigue n’est pas moins fécond qu’il est ingénieux et habile à s’entourer de faits.

Une fois la combinaison de M. de Talleyrand admise, dit M. Capefigue, on n’eut plus qu’à la compléter par l’adhésion de quelques membres de la chambre, propres à continuer le système, sans changer l’essence de la majorité : on prit MM. Passy, Pelet de la Lozère et Sauzet. Ce ministère, ainsi le juge M. Capefigue, ne saurait avoir de durée, parce que personne n’y représente les opinions de la restauration, qui avaient été si soigneusement conservées par M. Guizot et M. de Broglie ; il ne durera pas, parce qu’il n’est pas religieux, parce que ses membres ne sont pas de la réaction religieuse et spiritualiste qui s’opère en France, et sur laquelle M. Capefigue fonde le pouvoir qu’il attend, pouvoir renouvelé du temps qu’il préconise, de l’époque de 1820 à 1829, immense période du gouvernement représentatif ! (pag. 77). – « Combien de nobles fronts, dit-il, se couronnaient des palmes de la tribune ! combien les opinions, aux prises dans la grande arène légale des débats, se heurtaient en face du pays, vivement ému ! combien les salons politiques, aux étincelantes bougies, voyaient se grouper majorités, minorités, discutant, encore haletantes, sur un vote qui tenait à l’éloquence de MM. de Serres, Pasquier, Martignac ! etc. » — Pour nous qui ne regrettons de la restauration, ni les étincelantes bougies de ses salons politiques, ni l’éloquence de MM. de Serres, Pasquier, et Martignac, nous ne voyons pas encore quel bien, l’esprit religieux de M. de Broglie et de M. Guizot, qui sont protestans d’ailleurs, a fait à la France. L’esprit religieux de M. de Broglie ne l’a pas empêché de nous brouiller avec presque toutes les puissances, et l’esprit religieux de M. Guizot nous a gratifiés des lois de septembre et de l’état de siége. Il est vrai que ce sont là des actes dignes des beaux jours de la restauration.

Nous ne nions pas la tendance religieuse et morale dont parle M. Capefigue, mais nous nions que cette tendance soit contraire à la liberté et à l’esprit de la révolution qui a fondé le gouvernement sous lequel nous vivons. La révolution n’a pas produit un résultat tout contraire à son principe, comme le prétend M. Capefigue ; nous n’en sommes pas à traiter avec dédain les doctrines et les heureuses réformes de 1789, et à remonter, comme le veut M. Capefigue, aux idées de la vieille monarchie des Bourbons, pour y chercher le type d’un bon état social.

Nous ne savons si M. Guizot est réellement l’homme que veut M. Capefigue, si M. Molé, si M. Pasquier, que l’auteur de ce livre place sur la même ligne politique que M. Guizot, en sont encore aujourd’hui à l’admiration et à l’enthousiasme de la restauration où ils ont figuré à diverses reprises ; mais s’il en était ainsi, M. Guizot aurait peu de chances de