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étaient composés de députés des villes, de représentans des campagnes et de membres de l’ordre équestre ou de la noblesse. Ces états jouissaient des attributions que la loi actuelle confère aux conseils provinciaux, et de leur sein sortaient en outre les membres de la seconde chambre des états-généraux. On voit qu’ils étaient à la fois corps administratif et politique.

L’administration collective a donc dans ces contrées des racines antiques et profondes. Si l’on en jugeait d’après les injures prodiguées dans les discussions parlementaires à « la domination à jamais abhorrée des maires et des préfets, » et en général au régime français, que ce pays n’a pu connaître, à la vérité, qu’à une époque de violence et d’arbitraire, il n’y aurait certainement pas à attendre de réaction vers nos formes administratives. Une tendance à l’unité du personnel, si jamais elle s’y manifestait, serait le signe le plus certain de la chute de la nationalité belge.

La loi communale, votée le 30 mars de cette année, a complété ce système en appliquant les infimes principes à l’organisation municipale. Les conseils communaux jouissent d’attributions analogues à celles qui sont conférées aux conseils provinciaux (131) ; mais leurs délibérations ne sont exécutives que sous l’approbation de la députation permanente de ces conseils (241 suiv.). Au sein du conseil municipal surgit un pouvoir nouveau pour nous : le collége d’échevinage, dont le bourgmestre est président[1]. Ce conseil administre à la pluralité des voix et dans les mêmes formes que la députation provinciale. Le bourgmestre et les échevins, sont nommés par le roi dans le sein du conseil (art. 2).

Ce mode, emprunté à la législation française et introduit pendant le cours des débats sur la loi communale, qui se sont prolongés deux sessions, est un terme de conciliation entre des doctrines absolues également repoussées par la chambre des représentans. On demandait, d’une part, que le roi pût nommer le bourgmestre sans condition, en tant que ce magistrat est chargé de l’exécution des lois générales, et on lui refusait alors voix délibérative au conseil communal ; de l’autre, on contestait à

  1. Il y a deux échevins dans les communes de vingt mille habitans et au dessous, quatre dans celles dont la population excède ce nombre. (Loi communale, art. 3.) La députation provinciale est composée de six membres dans chaque province. (Loi provinciale, art. 96.) Le bourgmestre et les échevins sont salariés par la commune, et la loi provinciale fixe à 1,500 florins le traitement du membre de la députation permanente.

    On voit que la Belgique n’a pas plus reculé que les États-Unis devant l’universalité du salaire des administrateurs locaux. C’est la première conséquence du régime électif, et la France elle-même devra l’appliquer avant peu de temps.