Le corps électoral qui nomme les conseils de département, élit aussi les conseils d’arrondissement. Ceux-ci ont, du reste, une faible importance, et leur seule mission consiste à répartir l’impôt.
Une autre aggravation apportée au projet, c’est la durée du mandat. Des conseils généraux, nommés pour neuf ans, deviennent autant de chambres des pairs au petit pied. Le mandat dure autant que l’homme, et l’élection, dans ce système, est un bail à vie avec l’élu. Ajoutez que, le renouvellement s’opérant par tiers, la majorité ne peut jamais être rompue, et demeure immuable au milieu des mutations incessantes qui renouvellent le corps électoral, ainsi que l’opinion.
Dans le département de la Seine, les listes électorales, soit par le mouvement de la population, soit par la mobilité et la division des fortunes, se renouvellent intégralement tous les dix ans. Chaque année, un dixième des électeurs disparaît, pour faire place à un dixième nouveau. En admettant que la proportion ne soit pas la même pour toute la France, et que le corps électoral, dans les départemens, ne se renouvelle que tous les quinze ans, c’en est assez pour qu’il arrive qu’un conseiller élu, à l’expiration du mandat, ne se retrouve plus en face des électeurs qui l’avaient nommé. Dès lors, le contrôle cesse d’être possible, la responsabilité n’est plus qu’une fiction de la loi.
Pour justifier cette innovation sans exemple d’un mandat de neuf années, le rapporteur de la loi, M. de Barante, disait à la chambre des pairs : « Convaincus qu’il importe surtout de donner au conseil général le caractère d’une institution administrative, nous avons pensé qu’il devait avoir un esprit de suite et de tradition ; qu’il avait à continuer des affaires commencées, des travaux entrepris, des dépenses entamées ; qu’on devait éviter les variations et la vieille habitude française de ne pas finir ce qu’on a commencé, de se dégoûter des projets adoptés avec le plus d’engouement. Il ne s’agit point ici de représenter l’opinion politique d’un département ; l’élection des députés y suffit. »
Sans doute le conseil général d’un département n’est pas une chambre des députés, il ne fait pas les lois ni les ministres ; mais il vote un budget, il prononce sur certains intérêts en vertu du droit que lui ont donné ses commettans. Ceux-ci, qui contrôlent par leurs représentans la conduite de l’administration, ont intérêt à porter