Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 6.djvu/743

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
739
DU SYSTÈME ÉLECTIF EN FRANCE

10,000,000 de cotes et 123,000,000 de parcelles, tel était le cadastre de la propriété ; 94,000 électeurs composaient toute la nation politique. La plus extrême division était d’un côté, et de l’autre la plus ridicule concentration. Un pareil état de choses appelait une réforme ou une révolution ; c’est la révolution qui est venue.

En 1830, la chambre mit prudemment en dehors de la charte les conditions du droit électoral. Par là, cette question cessa d’être révolutionnaire, et devint une pure affaire de majorité. L’abaissement du cens à 200 francs fut un autre progrès ; progrès incontestable, et qui satisfit d’abord les organes les plus impatiens de la démocratie. Reportons-nous aux circonstances de cette délibération.

Après l’établissement du 7 août, une partie de la majorité législative, préoccupée des services importans que le corps électoral de la restauration avait rendus à la liberté, voulait le conserver tel quel, en le dégageant seulement de la superfétation du double vote, de ce privilége créé en 1820 pour l’aristocratie des plus imposés. Un autre côté de la chambre, plus frappé des difficultés que ce petit nombre de citoyens actifs avait rencontrées et surmontées avec tant de peine dans sa résistance au pouvoir, regardait comme une nécessité démontrée par la révolution de juillet, d’agrandir en France le cercle de l’élection. De ces deux opinions, celle-ci avait pour elle la presse ; celle-là était en faveur à la cour. Pour déterminer l’abaissement du cens, M. Laffitte, alors président du conseil, se vit obligé de déclarer qu’il se retirerait sur-le-champ si le vœu de l’opinion n’était point accueilli. On avait besoin de sa popularité ; le projet de loi fut présenté quelques jours après par M. de Montalivet à la chambre des députés.

Dans le système du projet, la propriété et l’industrie n’étaient plus les seuls indices légaux de la capacité d’élire. Il créait de nouvelles capacités dont il plaçait le signe dans certaines fonctions gratuites et électives, ou dans les professions libérales qui supposaient l’étude et l’instruction ; il substituait le cens relatif ou la combinaison des plus imposés au cens fixe ; et, en l’abaissant progressivement, il doublait le nombre des électeurs. Le cens de l’éligibilité était réduit à 500 francs.

En proposant l’adjonction des capacités, ou de la deuxième liste du jury, le ministre s’exprimait ainsi : « Il y avait, il faut en con-