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DE
L’ASSASSINAT POLITIQUE.

Le jésuite Mariana, au xvie siècle, mit en scène, dans son livre intitulé de Rege et regis institutione, Jacques Clément frappant Henri III, et son récit dramatique implique une approbation véritable. Après la tragédie vient la dissertation, et le jésuite démontre la légitimité du régicide. C’est de la scolastique appliquée au crime ; c’est le sophisme venant s’offrir pour guide au poignard de l’assassin.

De nos jours, on n’écrit plus en latin sur le régicide ; mais chez certains esprits, et heureusement ils sont en bien petit nombre, il s’est glissé cette désastreuse imagination, qu’assassiner un roi qu’on n’aime pas, est un acte humainement indifférent et politiquement glorieux.

C’est d’abord une étrange manière de ramener les rois au culte d’une égalité fraternelle, que de les mettre eux-mêmes hors l’humanité. Vous frémissez à l’idée de frapper l’homme obscur qui vous coudoie dans les flots de la foule ; mais vous irez à votre fantaisie vous ruer sur le chef de l’état ; et parce qu’il est roi, il ne sera plus pour vous un homme. Inepte et affreuse contradiction !