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voulu faire abstraction de la manière d’agir, et rappeler seulement son résultat. Quelque extension, cependant, que l’on donne à l’emploi de cette méthode, on sent qu’il sera toujours fort limité, puisqu’il n’est qu’une addition faite après coup au système égyptien par suite des rapports de l’Égypte avec les étrangers. Le texte de saint Clément d’Alexandrie ne favoriserait donc pas plus que ceux des autres écrivains l’opinion qui attribuerait à l’écriture hiéroglyphique une nature presque entièrement alphabétique.

Plutarque, qui ne s’est point occupé du système graphique des Égyptiens, dit quelque part à propos du nombre vingt-cinq, que ce nombre est celui des lettres égyptiennes. Il dit ailleurs que l’ibis tient le premier rang parmi les lettres des Égyptiens, mais il ne dit pas un mot de l’usage que l’on faisait de ces lettres, ni de l’importance du rôle qu’elles pouvaient jouer dans le système de l’écriture égyptienne. Il n’y a donc pas de raison pour voir là autre chose que l’alphabet hiéroglyphique dont nous venons de parler à l’occasion de saint Clément, d’autant plus que saint Clément et Plutarque, les seuls, parmi les écrivains de l’antiquité, qui aient parlé d’hiéroglyphes employés à la manière de nos lettres alphabétiques, nous ont conservé l’un et l’autre le seul exemple connu d’écriture hiéroglyphique analysée, et que cet exemple procède exclusivement par la méthode symbolique.

Si donc chez les auteurs anciens on a trouvé l’indication de la méthode alphabétique employée pour écrire les noms étrangers, on n’y saurait trouver de même que l’écriture hiéroglyphique était d’une nature presque exclusivement alphabétique ; bien loin de là, l’opinion adoptée par M. Champollion est en opposition directe avec tous les témoignages de l’antiquité. Cette circonstance nous rendra naturellement plus scrupuleux dans l’examen des preuves alléguées à l’appui du système nouveau ; cependant il ne faudrait pas les condamner sur ces seuls indices ; il n’est peut-être pas impossible que tous les auteurs qui nous ont parlé de l’écriture hiéroglyphique se soient mépris sur sa nature.

La mort n’a point permis à M. Champollion de publier lui-même les résultats de ses longues recherches, les principes qu’il avait déduits de ses immenses travaux, sa Grammaire égyptienne, qui est, dit-on, le résumé complet de tout son système. Cette grammaire n’est point encore tout entière entre les mains du public. La première moitié seulement a paru ; mais cette moitié suffit pour que l’on puisse apprécier le système tout entier, et l’apprécier sans injustice. L’auteur, s’écartant de la marche ordinairement suivie dans les grammaires, a mis avec profusion dans cette première partie de longues phrases hiéroglyphiques, empruntées aux monumens de toutes les époques, depuis les temps les plus reculés