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SIX ANS.

La maison de Brandebourg, qui gouverne la Prusse, a pu s’identifier avec elle, en représentant la réforme religieuse et le génie nouveau d’une démocratie militaire. La maison d’Orléans ne saurait avoir d’autre rôle et d’autre avenir que de représenter les principes de la révolution française.

Nous ne traçons ici ni fantaisies, ni chimères ; nous souscrivons à l’évidence des faits les plus positifs. Les partis et les gouvernemens ne se persuaderont-ils jamais qu’ils n’ont de force que par l’obéissance aux lois nécessaires ? Le monde moral n’est pas plus soumis à nos caprices que le monde physique, et la raison des choses, quand elle est méconnue, a d’inévitables vengeances.

Veut-on se convaincre du néant de la politique appelée doctrinaire, qui s’attache depuis six ans à nous démontrer que la vie est dans l’immobilité ? Si M. Guizot et ses amis eussent réussi, comme ils le désiraient, à entrer aux affaires avant ou après M. de Martignac eussent-ils eu d’autres maximes que celles qu’ils développent aujourd’hui ? N’eussent-ils pas gouverné avant 1830 comme après ? Quelle est donc cette politique qui est la même sous la légitimité, comme sous l’ordre nouveau ? Qui se trompe ici ? La France ou quelques hommes ? On ne saurait avoir raison contre la raison des choses, pas plus qu’il n’y a de droit contre le droit. On ne parviendra jamais à faire de l’époque où nous sommes le pléonasme de la restauration. Pour donner raison à l’école doctrinaire, il faudrait supprimer les prémisses de 1789 et le corollaire de 1830.

Quand le cabinet du 22 février s’est formé, on ne saurait nier qu’il n’y eût dans la sphère officielle quelques soupçons des devoirs que le temps imposait au pouvoir. On sentait confusément qu’une révolution devait produire son système, et non pas contrefaire celui d’une autre époque ; on cherchait à quitter la voie des réactions violentes ; on désirait changer un peu, mais sans en avoir l’air. Le nouveau ministère avait en face de lui la cohorte doctrinaire, qui lui demandait d’un air menaçant si vraiment il avait changé. D’un autre côté, les nouveaux alliés de la nouvelle administration disaient tout haut que leur appui était le prix d’un changement. Entre ses anciens amis et ses soutiens de la veille, la nouvelle administration semblait fort empêchée :

N’êtes-vous pas souris ? parlez sans fiction.