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Page:Revue des Deux Mondes - 1836 - tome 7.djvu/545

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ROMANCIERS DE LA FRANCE.

des pensées suivies, et que souvent vous n’êtes appliquée qu’à n’en point avoir. Mais il est difficile de ne pas dépendre de son naturel, quand on veut bien qu’il soit le maître ; et l’on se retrouve sans peine, quand on en a beaucoup à se quitter. Il est donc important de vous nourrir alors d’un pain plus solide que ne sont des pensées qui n’ont point de but, et dont les plus innocentes sont celles qui ne sont qu’inutiles. Et je croirais que vous ne pourriez mieux employer un temps si tranquille qu’à vous rendre compte à vous-même d’une vie déjà fort longue, et dont il ne vous reste rien qu’une réputation dont vous comprenez mieux que personne la vanité.

« Jusqu’ici les nuages dont vous avez essayé de couvrir la religion vous ont cachée à vous-même. Comme c’est par rapport à elle qu’on doit s’examiner et se connaître, en affectant de l’ignorer, vous n’avez ignoré que vous. Il est temps de laisser chaque chose à sa place et de vous mettre à la vôtre. La vérité vous jugera, et vous n’êtes au monde que pour la suivre, et non pour la juger. En vain l’on se défend, en vain on dissimule, le voile se déchire à mesure que la vie et ses cupidités s’évanouissent ; et l’on est convaincu qu’il en faudrait mener une toute nouvelle, quand il n’est plus permis de vivre. Il faut donc commencer par le désir sincère de se voir soi-même comme on est vu par son juge, Cette vue est accablante même pour les personnes les plus déclarées contre le déguisement. Elle nous ôte toutes nos vertus et même toutes nos bonnes qualités, et l’estime que tout cela nous aurait acquise. On sent qu’on a vécu jusque-là dans l’illusion et le mensonge ; qu’on s’est nourri de viandes en peinture ; et qu’on n’a pris de la vertu que l’ajustement et la parure, et qu’on en a négligé le fond, parce que ce fond est de rapporter tout à Dieu et au salut, et de se mépriser soi-même en tout sens ; non par une vanité plus sage et par un orgueil plus éclairé et de meilleur goût, mais par le sentiment de son injustice et de sa misère. »

Le reste de la lettre est également admirable, et de ce ton approprié et pressant. — Ainsi, vous qui avez rêvé, cessez vos rêves ! Vous qui vous estimiez vraie entre toutes, et que le monde flattait d’être telle, vous ne l’étiez pas, vous ne l’étiez qu’à demi et qu’à faux : votre sagesse sans Dieu était pur bon goût ! — Je lis plus loin une phrase sur ces années « dont on ne s’est point encore sin-