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qui a pu profiter des leçons de Champollion, M. Salvolini, poursuit courageusement les recherches du maître. Son programme, exposé dans une excellente critique de l’abbé Peyron, est de nature à dissiper toutes les incertitudes. Il s’attache principalement aux manuscrits funéraires, dont le sens est à peu près connu, et qui reproduisent une même formule consacrée par la religion égyptienne. Comparant tous les groupes auxquels on peut attribuer une même signification, il en note scrupuleusement les moindres variantes. S’il parvient à prouver qu’un même mot est écrit tantôt par plusieurs figures jouant le rôle de lettres, tantôt par une seule exprimant un symbole ou une idée, il aura confirmé la thèse fondamentale de Champollion par une démonstration sans réplique. Le même procédé servira tout naturellement de confirmation ou de correctif à l’alphabet recomposé par l’auteur de la Grammaire égyptienne. Si des travaux dirigés avec tant de persévérance et de sagacité ne conduisent pas à des résultats solides, il faudra abandonner le déchiffrement des hiéroglyphes à cette race de fous qui cherche encore le mouvement perpétuel et la transmutation des métaux.

Le dernier recueil publié par l’Académie des inscriptions contient un mémoire de M. Saint-Martin sur les inscriptions de Persépolis, que le célèbre voyageur Niebuhr a fait connaître à l’Europe. L’interprète n’avait pas à vaincre la difficulté principale qui compliquait la tâche de Champollion. Le doute n’est pas possible sur la valeur alphabétique des caractères cunéiformes (ainsi nommés parce qu’ils ont la figure de coins, ou plutôt de fers de flèches, diversement agencés pour former des lettres). Cette écriture étant assez commune dans les ruines de la Médie, de la Babylonie, de la Bactriane, se trouvant aussi en Arménie, en Égypte, et en général dans les contrées où les anciens Perses ont porté leurs armes, il est naturel de chercher à la traduire par l’idiome de ces conquérans, le zend, le plus ancien dialecte de la langue persane. Les inscriptions de Persépolis présentent trente-neuf caractères différens. M. Saint-Martin prétend en avoir reconnu vingt-cinq, douze consonnes et treize voyelles ; et cet alphabet, quoique incomplet, lui livre le sens de deux inscriptions qu’il rapporte à Darius et à Xerxès. Sa version, très différente de celles qu’on nous avait déjà données avant lui, n’est pas généralement admise par les érudits. Leur science divinatoire s’exerce aujourd’hui sur d’autres monumens de même nature récemment découverts. On peut espérer qu’une lecture exacte de l’écriture cunéiforme jettera enfin quelque lumière sur les ténébreuses annales des royaumes asiatiques.

Une série d’ouvrages, que M. l’abbé Delatouche a intitulés : Études hébraïques et Panorama des langues, pourrait bien fournir un nouveau grief aux adversaires de la science étymologique. M. Delatouche prétend avoir