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bœr, dépourvus de toute société et de tout moyen de distraction. Que feraient-ils alors, s’ils n’aimaient le travail ? Les uns lisent, les autres s’occupent d’ouvrages d’orfèvrerie ou de ciselure. L’été leur ramène la vie de voyage ; l’hiver leur impose la vie de solitude et de recueillement. Puis, l’Islande est maintenant dotée de plusieurs établissemens dont on aime à reconnaître l’heureuse influence. Il y a une imprimerie à Vidoë, une bibliothèque publique et une société littéraire à Reykiavik, une école latine à Besesstad.

L’imprimerie fut introduite en Islande en 1530, et établie à Hoolum. Ce fut l’évêque Gudbrandr qui fit ce présent à son pays. En 1685, l’évêque Thorlakr obtint qu’elle fût transférée à Skalholt, mais elle n’y resta que jusqu’en 1704. Un autre évêque de Hoolum la racheta pour cinq cents impériaux[1], et la transporta de nouveau dans sa métropole. Il est sorti de cette imprimerie plusieurs ouvrages remarquables, et entre autres deux belles bibles in-folio, devenues fort rares. Aujourd’hui elle appartient au gouvernement, qui l’afferme au propriétaire de l’ancien cloître de Vidoë pour deux cents écus par an. On y imprime des livres d’éducation et des livres de prières, quelques recueils de poésie, et les sagas versifiées que les étudians islandais publient sous le titre de Rimur. L’imprimeur emploie trois ou quatre ouvriers, et des commissionnaires distribuent ses livres dans toutes les parties de l’Islande.

La bibliothèque de Reykiavik fut fondée en 1821, par les soins de M. Rafn, professeur à Copenhague. Elle appartient à toute l’Islande, car toute l’Islande a contribué à la former, à l’enrichir. Le gouvernement danois ouvrit une souscription, et les particuliers donnèrent des livres et de l’argent. Chaque année encore, le paysan, le prêtre, le marchand, apportent leur tribut volontaire à cette bibliothèque, et chaque année le gouvernement lui envoie les meilleurs livres imprimés à Copenhague. Aujourd’hui elle compte près de 8000 volumes, composés de classiques anciens et d’ouvrages étrangers. Le but des fondateurs est de la rendre aussi populaire que possible, et surtout d’y former une collection complète de tous les ouvrages ayant rapport à l’Islande. Le lieu qu’elle occupe n’est pas disposé de manière à ce qu’on puisse y venir lire, mais chaque semaine elle est ouverte à jour fixe, et l’on prête des livres aux habitans des districts les plus éloignés pour plusieurs mois, et quelquefois pour un an. Ainsi quand l’Islandais des montagnes du nord vient à Reykiavik, la bibliothèque populaire s’ouvre pour lui, il y dépose son offrande, et il y prend les livres qu’il veut étudier. Si cette coutume présente un résultat fâcheux, celui de priver pendant un assez long espace de temps la bibliothèque de plusieurs ou-

  1. Monnaie ancienne du pays.