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les mouvemens des réfugiés ; mais leur surveillance était devenue fort difficile, depuis qu’ils se mettaient en garde contre des espions affiliés à leurs clubs, et paraissaient bien décidés à exécuter un article des statuts de leur association, qui déclare toute trahison passible de la peine de mort, et chaque membre de la société tenu de procéder, quand le comité l’en charge, à l’exécution de la sentence.

Un réfugié allemand, Rauschenplatt, natif du Hanôvre, désigné sous le nom de Kater dans la correspondance secrète de l’association de la Jeune-Allemagne, paraît avoir provoqué la réunion des Granges (canton de Soleure) qui a ranimé en Suisse la question des réfugiés, pour y faire délibérer sur une prise d’armes dont il était également le promoteur. Rauschenplatt avait fait partie de l’expédition de Savoie, du 1er février 1834. Depuis il s’était rendu à Barcelonne auprès du général Mina, dans un moment où la capitale de la Catalogne était devenue un foyer très ardent d’opinions révolutionnaires, et où le parti républicain fondait de grandes espérances sur le nouveau capitaine-général de cette province. Il en a été question dans le procès d’Alibaud. Rauschenplatt revint en Suisse au commencement de mai ; il parut à Berne vers le milieu du mois, et eut la hardiesse de faire inscrire son nom sur la liste des étrangers distingués ; puis il passa dans le canton de Thurgovie, limitrophe de l’Allemagne, où se rendirent aussitôt beaucoup de réfugiés allemands. L’apparition de cet homme, que tous les documens représentent comme un caractère fortement trempé, un chef de parti entreprenant et d’une activité peu commune, produisit une certaine sensation en Suisse, et détermina sans doute quelque mouvement parmi les réfugiés. Toujours est-il que fort peu de temps après la police de Zurich découvrit qu’une réunion devait avoir lieu le 28 mai aux Granges, dans le canton de Soleure.

C’est ici que se place le premier fait qui a démontré la partialité de certains cantons envers les réfugiés, leur mauvaise foi dans l’exécution des engagemens pris par la Suisse, et la nécessité de consacrer dans une mesure générale l’intervention du vorort. Ceci est d’autant plus essentiel à noter que la sévérité du langage de la France, dans la note du 18 juillet, tient peut-être à ce premier fait. Il est certain que la conduite du canton de Soleure