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DÉMÊLÉS DE LA FRANCE ET DE LA SUISSE.

tons et prit sérieusement en main la conduite de toute cette affaire.

Les dispositions du gouvernement de Berne étaient bonnes. Il voulait prévenir, autant qu’il serait en lui, par des mesures promptes et sévères, le renouvellement de ce qui s’était passé en 1834, un déluge de notes allemandes dont il aurait tout le poids à supporter comme vorort, les difficultés et les dangers de toute espèce qui en seraient, pour la confédération et pour lui, l’inévitable conséquence. Les actes ont répondu aux paroles. Dès le 6 juillet, il a fait conduire à la frontière de France les réfugiés du canton qui s’étaient notoirement rendus indignes de l’hospitalité helvétique. Malheureusement, beaucoup d’autres, et des plus dangereux, s’étaient déjà soustraits à toutes les recherches.

Pendant l’intervalle de près d’un mois (22 juin, 18 juillet) qui sépare la demande officielle du vorort de la réponse du ministère français, on avait pu se convaincre que plusieurs cantons n’étaient pas disposés à suivre l’exemple du gouvernement de Berne. Tous ceux où le radicalisme dominait, comme Saint-Gall, Vaud, Thurgovie, offraient un sûr asile aux fugitifs des autres états et neutralisaient ainsi les bonnes intentions du plus grand nombre de leurs confédérés. Les puissances de l’Allemagne s’en irritaient, on prenait des résolutions violentes, et tout annonçait une crise pareille à celle de 1834. Pour la prévenir, que fallait-il ? Obtenir de la confédération qu’elle adoptât des mesures efficaces et sérieuses, pour empêcher un intolérable abus du droit d’asile, contraire à sa neutralité garantie par l’Europe, et qui provoquait sans cesse les justes plaintes des états voisins. Il fallait une espèce de législation fédérale sur les réfugiés, pour que le mauvais vouloir d’un ou deux cantons ne pût compromettre l’indépendance et le repos de toute la Suisse. Voilà ce que les puissances allemandes étaient bien résolues à exiger, avec la hauteur qu’elles y avaient déjà mise en pareille occasion. La France n’avait pas été directement menacée ; une politique étroite et au jour le jour lui aurait conseillé de s’abstenir et de laisser naître les embarras. Mais, puisque la Suisse s’adressait à elle pour se débarrasser des réfugiés sans déshonneur et sans les livrer aux polices de l’Allemagne, le ministère pensa qu’il lui appartenait de faire ouvrir les yeux à la Confédération helvétique sur les dangers auxquels elle s’exposerait en ne