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deux chambres ; mais il fut détourné de ce dessein par ses ministres et ses conseillers intimes, et il se détermina à sanctionner le bill qui l’avait si vivement offensé.

Plus tard encore, le roi d’Angleterre eut le déplaisir de voir critiquer avec violence par le parlement le traité de partage de la monarchie espagnole, dans lequel il était entré secrètement sur les instances de Louis XIV. Il fut supplié par les deux chambres de vouloir bien à l’avenir, dans toutes les affaires importantes, requérir et admettre l’avis de personnes qui pussent inspirer la confiance par une position et une probité connues. Rien ne pouvait être plus désagréable au roi qu’une censure qui s’adressait à des combinaisons diplomatiques qu’il avait adoptées et conduites lui-même.

Guillaume, dont on vante à bon droit les talens politiques, mettait son habileté dans une résignation nécessaire et pleine de calme aux maximes constitutionnelles du gouvernement qu’il avait accepté. On disait de lui qu’il était stathouder d’Angleterre et roi de Hollande. Il réussit toujours, en politique, d’accepter les situations nécessaires. Cette judicieuse déférence double la force ; et quand on a plié à propos, on ne s’en relève que plus puissant.

Dans un gouvernement parlementaire, le roi et les chambres peuvent se contredire ; et quand cette contradiction est loyale, elle profite à tous. Si la chambre des députés s’imaginait qu’elle ne peut rien refuser à la royauté sans la détruire, elle manquerait à sa propre institution, et travaillerait à la perte de ce qu’elle veut sauver. Quand la fidélité d’un parlement est au-dessus de tout soupçon, sa fermeté est sans périls, et quand on a fait un roi, on peut lui résister avec respect.

Il y avait parmi nous une école qui s’était vantée de savoir et de nous enseigner mieux que personne le gouvernement parlementaire, de connaître avec précision où commencent et s’arrêtent les droits des chambres et les droits de la couronne, de se montrer toujours libérale sans faction et monarchique sans servitude. Aujourd’hui cette école a passé tout-à-fait à l’obéissance passive : de whig qu’elle se disait, elle est devenue non-seulement tory, mais absolutiste. Ses journaux prêchent le droit du roi contre le droit des chambres, et ne veulent plus que notre gouvernement soit le gouvernement parlementaire des majorités.