L’enjeu est une discrétion[1].
Soit. — J’appelle rouge.
C’est le valet de pique ; vous avez perdu. Donnez-moi cette bourse bleue.
De tout mon cœur, mais je garde la rouge, et quoique sa couleur m’ait fait perdre, je ne le lui reprocherai jamais ; car je sais aussi bien que vous quelle est la main qui me l’a faite.
Est-elle petite ou grande, cette main ?
Elle est charmante et douce comme le satin.
Lui permettez-vous de satisfaire un petit mouvement de jalousie ?
Ernestine, je vous adore.
Vous n’aimez donc plus Mme de Blainville ?
Ah ! grand Dieu ! je ne l’ai jamais aimée.
Ni moi non plus, monsieur de Chavigny.
Mais qui a pu vous dire que je pensais à cette femme-là ? Ah ! ce n’est pas elle à qui je demanderai jamais un instant de bonheur ; ce n’est pas elle qui me le donnera !
Ni moi non plus, monsieur de Chavigny. Vous venez de me faire un petit sacrifice, et c’est très galant de votre part ; mais je ne veux pas vous tromper : la bourse rouge n’est pas de ma façon.
Est-il possible ? Qui est-ce donc qui l’a faite ?
- ↑ On appelle discrétion un pari dans lequel le perdant s’oblige à donner au gagnant ce que celui-ci lui demande, à sa discrétion.