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REVUE ÉTRANGÈRE.

pas encore parvenu à s’entendre, et M. Calatrava reste le collègue de M. Mendizabal. Au milieu de tous ces embarras, le parti modéré nous semble trop impatient, non pas de revenir aux affaires (il n’a, en ce moment, aucune chance de succès), mais d’user contre les difficultés du pouvoir une autre nuance de l’opinion qui l’en a fait tomber.

La constitution nouvelle, acceptée et jurée par la reine régente au nom de sa fille, a été solennellement promulguée à Madrid et dans toutes les grandes villes d’Espagne. L’ordre n’a été troublé nulle part à cette occasion, et l’approbation du pays semble ratifier l’œuvre des cortès. Mais l’assemblée ne doit pas se séparer, avant d’avoir voté les institutions organiques et les principales mesures de réforme destinées à compléter la révolution dans l’ordre politique et dans l’ordre civil. La loi électorale et la suppression des dîmes ont déjà signalé cette seconde phase de son existence, que le ministère cherchera sans doute à prolonger le plus possible, pour n’avoir pas en même temps la guerre civile à combattre et deux nouvelles chambres à manier. Cependant la promulgation du pacte fondamental a soulevé une grave question, celle du maintien ou de la suppression des fueros de la Biscaye et des trois autres provinces. Légalement cette question n’en est pas une. La constitution s’applique à toute la monarchie espagnole, et doit en régir toutes les parties. Mais en fait, les provinces qui avaient conservé leurs priviléges ne veulent pas s’en dessaisir ; et ce n’est pas des insurgés carlistes que nous voulons parler, c’est de la population libérale qui reconnaît le gouvernement de la reine et l’ordre de succession établi par le testament de Ferdinand VII. Bilbao proteste contre la suppression des franchises de la province, et jusqu’ici aucun acte officiel n’a constaté sa soumission à la loi qui les abolit. L’insurrection provinciale qui s’est armée du nom de don Carlos a donc des racines bien profondes dans l’attachement de ce pays à ses anciennes institutions et à des priviléges qui ont fait sa prospérité, au milieu de la décadence du reste de la monarchie ! Aussi ne peut-on s’expliquer comment, depuis l’origine de cette guerre, le gouvernement espagnol n’a pris aucune mesure pour rassurer solennellement les populations sur le sort des libertés qui leur ont mis les armes à la main.

Le tableau que nous venons de tracer montre combien est grave la situation actuelle de l’Espagne, combien de dangers elle présente, et combien peu elle offre de ressources.

La politique et l’humanité ont également à gémir de la prolongation