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Paul Ier débuta par un nouveau traité de commerce avec l’Angleterre, reçut Louis XVIII à Mittau, fit de nouvelles levées, équipa des flottes, fit, en 1798, un traité offensif et défensif avec l’Autriche, et fit marcher deux corps d’armée commandés par Suwaroff. On vit alors le phénomène d’une flotte turque et d’une flotte russe marchant de conserve contre les îles de l’Archipel, d’où elles chassèrent les garnisons françaises. Il n’y a que deux mots à dire du règne de Paul Ier, relativement à la France. Jamais plus grande énergie ne fut développée. L’expédition de Suwaroff doit être regardée comme la plus violente démonstration qui ait été tentée contre la révolution française. La conquête de l’Italie semblait assurée, on pouvait se flatter de faire celle de la France. Cette grande et hardie tentative n’aboutit cependant qu’à ramener Paul Ier à une alliance avec Bonaparte, et il l’eût établie sur de plus solides bases, sans la mort qui l’arrêta à son tour, mais qui n’empêcha pas l’alliance de se conclure plus tard, car les intérêts de la Russie ne permettent pas une guerre systématique contre la France, et tous les souverains russes doivent subir la loi de nécessité qui les rejette, quel que soit leur caractère personnel, dans un système pacifique.

Le règne de l’empereur Alexandre manifeste d’une manière non moins éclatante cette nécessité de la Russie.

L’empereur Alexandre commença par se rapprocher de la Grande-Bretagne, en annonçant au régent, par une lettre autographe, son avénement au trône. L’embargo mis sur les vaisseaux anglais, fut levé, et un traité de navigation conclu avec l’Angleterre[1]. La paix fut formellement signée avec l’Espagne le 4 octobre, et le 8, avec le premier consul (pour la France). Le 7 mars suivant, la paix d’Amiens donna l’espoir d’une paix générale.

L’empereur Alexandre se livra alors sans réserve à la générosité de ses sentimens. Il abolit la prohibition qui pesait sur les écrits en langue étrangère, ainsi que l’ukase qui établissait la censure sur les écrits publiés en Russie. Toutes ses ordonnances furent conçues dans le même esprit qui avait dicté ces deux mesures.

On connaît la suite des idées et des évènemens qui a amené l’empereur Alexandre de ces dispositions à celles qui ont marqué la fin de son règne. L’empereur Alexandre marchait, sous tous les rapports, trop en avant de la Russie, qu’il n’apprit à connaître que dans

  1. 17 juillet 1801.