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Chaldéens divisaient l’écliptique en douze parties, en conclut qu’ils avaient le même zodiaque que les Grecs ; et, comme les douze signes du zodiaque grec existent dans les sphères des Persans, des Arabes, et ont été retrouvés jusque dans l’Inde, il admit comme prouvé que l’Orient est la source d’où la Grèce avait tiré ces constellations. S’il avait recherché d’abord quelle pouvait être l’époque des monumens dont il s’appuyait, il aurait vu sans doute que cette identité pouvait bien ne rien prouver du tout, car il n’en est aucun qui ne soit d’une époque de beaucoup postérieure à l’ère vulgaire ; rien n’empêcherait donc de croire que ces zodiaques sont le zodiaque grec, que l’influence de l’école d’Alexandrie aura transporté dans tout l’Orient peu de temps avant ou après notre ère. Mais Bailly, qui, sur l’autorité de Goguet[1] et d’autres, trouvait jusque dans Job des preuves de l’existence du zodiaque[2], ne pouvait concevoir le moindre doute sur l’antiquité de cette institution en Orient. Il ne pouvait sentir la nécessité d’un pareil examen, et il ne balança pas à reporter au-delà du déluge[3] l’origine du zodiaque. Naturellement il en donna l’invention à cet ancien peuple de la Haute-Asie qui, selon lui, nous avait tout appris, excepté, comme disait d’Alembert, son nom et son existence. L’autorité de cet éloquent écrivain prépara la voie à d’autres hypothèses plus hardies encore.

Un homme d’un grand savoir, d’un esprit étendu et pénétrant, malheureusement peu critique, Dupuis, fit remonter l’institution du zodiaque à une époque bien plus reculée encore. Bailly s’était arrêté à l’an 4,600 avant notre ère. Dupuis ne se contenta point de cette ancienneté, déjà fort respectable ; il recula l’époque jusqu’à 13,000 ou 15,000 ans, en la rattachant à l’explication même de chacun des douze signes.

Cette explication ingénieuse n’était que le développement d’une hypothèse indiquée par un grammairien du ve siècle de notre ère. Dupuis l’adopta, sans s’apercevoir qu’elle appartient à un ordre d’idées étrangères aux opinions de l’antiquité.

On sait que, par suite du contact des Grecs et des Romains avec les nations asiatiques, il se forma un singulier mélange des superstitions de l’Occident et de l’Orient. La religion grecque et romaine accueillit, avec une facilité merveilleuse, les cultes étrangers ; plusieurs

  1. Origine des Lois, tom. i, pag. 413 et suiv. éd. de 1820.
  2. Hist. de l’Astronomie ancienne, pag. 478. Qu’il soit question dans Job de quelques constellations (9, 9 ; 38, 32), cela est certain ; mais on ne sait pas au juste quelles sont celles dont il a voulu parler.
  3. Ouvrage cité, pag. 74,