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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 12.djvu/344

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et sans adjonction, était proscrit, comme ceux de citoyen, de section, et tout ce qui semblait tendre à l’imitation des habitudes révolutionnaires de la France. Ceux qui les prononçaient couraient le risque d’être condamnés comme séditieux. Du reste, malgré les nouvelles réunions de la convention et le renfort des patriotes anglais et irlandais, la terreur était grande à Édimbourg, dans le cœur des réformistes. L’habeas corpus venait d’être suspendu par acte du parlement, et le bruit courait que des troupes hanovriennes et hessoises marchaient de divers points de l’Angleterre vers l’Écosse.

Dans le courant du mois de décembre, les associés, convoqués par Skirving, s’étaient rassemblés dans une salle du Blackfriar’s wynd, et discutaient les termes d’une pétition au parlement, lorsque M. Elder, lord prévôt d’Édimbourg, assisté d’une troupe de constables, vint sommer les délégués de se séparer. Ceux-ci obéirent aux magistrats sans qu’il fût nécessaire d’employer la force ; mais résolus cependant à ne pas faire l’abandon de ce qu’ils regardaient comme un droit, sans quelque protestation éclatante, ils se réunirent de nouveau sur le Grass-market, où Skirving les avait convoqués ; leur rassemblement fut de nouveau dispersé. Du Grass-market ils se rendirent dans la banlieue de la ville : là, ils croyaient échapper à la juridiction du lord prévôt ; mais les mesures étaient bien prises, et, dans la banlieue, le sheriff du comté du Mid-Lothian les attendait et les dispersa encore une fois. Bien plus, sur un mandat du sheriff, Skirving, l’opiniâtre secrétaire, fut arrêté, et ses papiers furent saisis.

Pendant ce temps, une fermentation extraordinaire s’était manifestée dans la ville. La vieille métropole d’Écosse, dont les citoyens sympathisaient avec les novateurs, avait vu avec terreur la dispersion de leurs meetings, et le peuple s’indignait des coups d’état du lord prévôt et du sheriff. « Les citoyens ne pouvaient-ils donc plus se rassembler librement, disaient les meneurs, pour exposer au parlement leurs griefs ? La liberté était-elle donc perdue ? Les jours, d’odieuse mémoire, de la tyrannie du duc de Cumberland, allaient-ils revenir ? » Les gens du peuple couraient l’un chez l’autre, s’interrogeaient, se consultaient, s’exaltaient. Le moment critique était arrivé. Devaient-ils prêter assistance aux conventionnels ou se soumettre à la tyrannie du pouvoir ? Beaucoup étaient décidés à la résistance, un plus grand nombre à la soumission. Ceux qui étaient disposés à seconder les délégués, ne savaient comment le faire ; ils manquaient de chefs, et ils ignoraient où ils devaient se rassembler. Vers le soir cependant, on apprit que les conventionnels devaient