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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 12.djvu/507

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COURS D’HISTOIRE ANCIENNE.

géologie (c’est-à-dire la théorie de la terre) n’existait pas. Plus tard, quand l’enchaînement des faits a pris une signification positive, quand les causes, d’obscurément divines qu’elles étaient, sont devenues intelligiblement providentielles, les lois nouvelles que prononce la philosophie, ne peuvent plus résulter que de l’examen patient et de la critique rigoureuse des faits… Quand il faudra que les résultats isolés des diverses applications de l’intelligence prennent une forme harmonieuse et durable, laissons, messieurs, cette œuvre à la plume qui peint d’un trait, à la voix qui sculpte d’un mot ; brûlons sans pitié toutes les généralités qui pullulent à la surface de notre littérature. »

J’en ai dit assez, je pense, pour montrer de quelle manière l’histoire ancienne est professée dans la chaire d’histoire moderne de la faculté des lettres de Paris, pour montrer quelle espèce d’enseignement se produit dans cette chaire sous l’imposant patronage de M. Guizot. J’ai été prolixe, j’ai été minutieux, j’ai dû fatiguer ceux qui m’auront voulu suivre ; mais aussi ce n’est pas d’un livre ordinaire qu’il s’agit ; un livre ordinaire eût passé sans attirer notre attention. Les doctrines du jeune suppléant de M. Guizot sont l’objet d’un enseignement public, d’un enseignement officiel. Ce n’est point un jeu, cependant, que la mission d’instruire cette jeunesse qui, de tous les points de la France, je devrais dire de l’Europe, vient s’asseoir chaque année sur les bancs de la Sorbonne. Non, la sollicitude des familles n’envoie point cette jeunesse studieuse pour qu’elle soit livrée, comme matière à expérience, aux essais informes et indécis de suppléans novices, chez lesquels on demanderait au moins de la maturité. Experimentum faciamus in animâ vili, « expérimentons sur cette vile espèce, » n’est point une maxime de notre temps, et surtout n’est point une maxime applicable aux premières écoles de la France. Que les jeunes gens, ambitieux d’annoncer des choses nouvelles, s’exercent longuement dans l’ombre, puis qu’ils soumettent au public, à l’aide de la presse, les résultats de leurs persévérans efforts. Avant qu’il leur soit permis de les produire dans une chaire publique, dans une chaire de la Sorbonne, il faut que ces choses nouvelles aient subi l’épreuve de la critique, il faut qu’elles aient été soigneusement mûries, il faut surtout qu’elles soient bien fixes, bien arrêtées. Ce serait une étrange chose, vraiment, qu’un professeur d’histoire obligé périodiquement de remplacer par des assertions contradictoires ses précédentes assertions. Quelle confiance peut inspirer à ceux qui l’écoutent celui qui viendra leur dire comme M. Lenormant : « Des considérations nouvelles, dans mon cours de l’an 1836-37, m’ont