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Les zoologistes transcendans. — Les observations de M. Lartet, concordant avec les idées antérieures de M. Geoffroy-Saint-Hilaire, sont devenues la cause indirecte d’une discussion qui a eu, pour résultat, d’éloigner des séances de l’Institut ce dernier naturaliste qui, avant de se livrer tout entier à ses études philosophiques d’aujourd’hui, avait rendu de nombreux et d’incontestables services à la zoologie ; mais on doit espérer que ses adieux à l’Académie ne sont pas irrévocables.

Des remarques faites en passant dans son mémoire, sur la manière dont George Cuvier avait contribué à mettre d’accord les théologiens avec les géologues, amenèrent une réplique passablement acerbe de M. Frédéric Cuvier, qui avait cru, mal à propos, la mémoire de son frère attaquée.

M. Geoffroy, si fier du principe de l’unité de composition, que depuis long-temps il regarde comme un fait parvenu au plus haut degré d’évidence et comme digne d’entrer en ligne avec le principe de la gravitation universelle ; M. Geoffroy qui, conséquemment se fait proclamer le Newton, le Kepler de la France, dans un dictionnaire pittoresque, s’est figuré à tort qu’il n’avait pas toute la liberté nécessaire pour répondre ; et mécontent des entraves que lui opposait le réglement de l’Académie, il s’est trouvé, dit-il, forcé par des meurtrissures trop nombreuses et trop incisives de renoncer à ses études de paléontologie. C’est ainsi qu’il s’exprime dans une brochure adressée à ses confrères, en annonçant qu’il va désormais reprendre ses études de la loi d’attraction de soi pour soi ; loi que personne assurément ne comprend aujourd’hui. Il accuse en même temps l’un des consuls de l’Académie, demeuré seul en l’absence de l’autre consul, d’avoir usé trop largement à son égard de sa position de maître absolu, et pourtant, si consul il y a, M. Flourens est bien le plus accommodant et le plus pacifique des consuls. Enfin, dans la brochure que nous venons de citer, M. Geoffroy se plaint encore de ce que l’Académie a refusé de lui payer les frais d’un voyage à Oxford qu’il voulait faire pour trouver la confirmation d’une de ses idées. Cette confirmation toutefois lui a été fournie par le squelette d’un crocodile fossile découvert auprès de Caen par M. Deslongchamps qui, à ses propres frais et avec une admirable patience, a su en réunir les débris déjà en partie dispersés avec les blocs de pierre dans lesquels ils étaient engagés.

M. Deslongchamps, dans un fort beau mémoire qu’il a publié, sans juger à propos de le soumettre préalablement à l’Institut, a donné à ce grand lézard antédiluvien le nom de Pœkilopleuron, pour indiquer les diverses sortes de côtes dont il était pourvu. Cet animal, en effet, avait le long du ventre une réunion d’os analogues à ceux qui entourent les organes respiratoires dans la poitrine, de sorte qu’il paraît avoir dû posséder un double système respiratoire.

Un autre académicien, non moins adonné que M. Geoffroy aux spéculations de zoologie transcendante, M. Serres, vient d’annoncer que tous les naturalistes, jusqu’à ce jour, se sont mépris dans la comparaison qu’ils ont voulu faire des organes des mollusques avec ceux des animaux vertébrés ; car,