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ADRIEN BRAUWER.

Le soleil allait disparaître, et les maisons bariolées de Harlem scintillaient sous ses derniers rayons. Les étroites fenêtres, fermées pendant le jour, commençaient à s’ouvrir à la fraîcheur du soir ; les servantes causaient près des portes, et des jardins, placés derrière chaque maison, s’élevaient des bouffées odorantes qui se répandaient dans les carrefours ; on était à cette heure charmante où la lumière et le bruit s’adoucissant, la fatigue du jour se transforme en une fraîche langueur.

À l’entrée d’une pauvre maison basse et mal peinte, un enfant de douze ans était assis, les bras nonchalamment appuyés contre un châssis posé sur ses genoux et la tête rejetée en arrière. Son pâle visage semblait se ranimer aux brises du soir, et ses yeux fatigués souriaient en suivant le vol des oiseaux égarés parmi les toits. Il y avait déjà quelques instans qu’il se livrait à cette rêveuse nonchalance lorsqu’une voix aigre se fit entendre près de lui :

— Est-ce sur les nuages que tu comptes peindre tes fleurs, garnement ? s’écria une petite femme noire et sèche qui sortait de la maison, la coiffe toute hérissée d’aiguilles garnies de laines coloriées.

L’enfant se redressa comme s’il se fût réveillé en sursaut, rougit et pâlit tour à tour, puis baissa les yeux avec confusion.

— Voyons ce que tu as fait depuis que tu es là, reprit la femme maigre en piquant à sa coiffure une nouvelle aiguille.