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Page:Revue des Deux Mondes - 1837 - tome 9.djvu/328

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REVUE DES DEUX MONDES.

Aucune barrière, aucun voile n’arrêtait sa vue. Toutes les villes lui montraient leurs trésors ; toutes les forteresses, leurs armures ; toutes les demeures des hommes, leurs vices et leurs passions. Mais il ne fut séduit ni par l’or entassé dans le palais des rois, ni par les boucliers brillans suspendus aux murailles des châteaux, ni par les joyeuses réunions où coule l’hydromel. Il venait de voir au pied des montagnes une jeune fille d’une ravissante beauté, et il se retire avec douleur ; son cœur est agité, son repos est perdu. Ses amis, le voyant tout à coup devenir si pensif, le questionnèrent à diverses reprises, et il finit par leur avouer ses rêves d’amour. L’un d’eux promet d’aller lui chercher la jeune fille ; mais il exige que Freyr lui donne pour récompense sa redoutable épée. Le dieu y consent, et, quelque temps après, épouse sa bien-aimée. Mais quand viendra le dernier jour du monde, il se présentera sans armes au combat, et sera vaincu par les géans.

Ces trois dieux formaient le triangle symbolique, la trinité Scandinave, la trimourti indienne. Après eux vient Niord, le Neptune des contrées septentrionales, qui gouverne les flots, et distribue à ses favoris les trésors engloutis par les vagues de la mer ; Tyr, le soutien des guerriers, le protecteur des athlètes ; Braga, le dieu du chant et de la poésie. Les runes sont écrites sur sa langue, et il a épousé Iduna, poésie vivante, qui, avec ses pommes d’or, empêche les dieux de vieillir et le ciel de se dépeupler.

Heimdall est le gardien du pont céleste ; il a été enfanté par neuf femmes. Nuit et jour il veille à l’entrée de la forteresse des dieux pour prévenir l’attaque des géans. L’Edda dit qu’il dort moins qu’un oiseau. Son regard perçant distingue les plus petits objets à cent lieues de distance, et il a l’ouïe si fine, qu’il entend croître l’herbe des champs et la laine des brebis.

Balder est le dieu bon et aimable, le principe du bien, l’idée du beau. Une nuit, il rêve qu’il doit bientôt mourir. Il raconte ce rêve à Odin, qui fait seller son cheval, descend aux enfers, et va consulter la prophétesse. Elle lui dévoile la destinée de Balder, et Frigga s’adresse à tous les êtres animés de la nature, et leur fait prêter serment de ne pas nuire à son fils. Par malheur, elle oublie un jeune arbre nouvellement planté auprès du Valhalla, et si faible encore, qu’elle ne pouvait pas le croire dangereux. Mais Loki, le génie du mal, a su ce qui s’était passé. Il arrache lui-même la branche d’arbre oubliée par Frigga ; et, un jour que tous les dieux étaient réunis et s’amusaient à poursuivre avec leur lance et leur épée le bon Balder, Loki remet la baguette fatale entre les mains

    de Dieu, d’où l’on découvre tout ce qui se passe sur la terre. Il aperçut une femme qui volait, et en fut si irrité, qu’il lui lança l’escabeau du seigneur à la tête. (Kinder und Haus Mærchen, pag. 35.)