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qu’on a nié, ce n’est d’aucune façon l’idiome, que sa science et son courage ont retrouvé ; c’est seulement la généralité primitive qu’il attribue à la romane rustique. Le président Claude Fauchet dans son livre sur l’Origine de la langue et poésie françoise (l. i. ch. iii), à propos du serment des fils de Louis-le-Débonnaire, en trouve la langue plutôt pareille à celle dont usent à présent les Provençaux, Catalans ou ceux du Languedoc qu’à aucune autre. Il en conclut que cette langue était la rustique romane d’alors, en laquelle Karle-le-Grand avait voulu que les homélies prêchées aux églises fussent translatées. Il cherche ensuite à montrer comment cette langue romane a été plus tard chassée outre Loire, delà le Rhône et la Garonne ; il l’explique par le partage des enfans de Louis-le-Débonnaire qui rompit la correspondance d’un bout du pays à l’autre. La séparation de Capet qui suivit, apporta un plus grand changement encore, voire doubla la langue romande. À un autre endroit il montre cette première langue romande du serment de 842, séparée en trois langues qui vont se différenciant avec le temps, langue thioise-wallone en Flandre, langue française et langue provençale. Cette opinion ici à l’état d’aperçu naturel, comme elle l’est aussi dans Cazeneuve, Huet, Lebœuf, l’Histoire du Languedoc, et les bénédictins de l’Histoire littéraire, est celle que M. Raynouard formula plus tard, en l’étendant et la modifiant pour l’élever en système. Ainsi, selon le savant philologue, après la conquête romaine l’Italie, la France, l’Espagne, parlent un latin uniforme. Mais de la corruption de cette langue en naît une autre, où, sur dix mots, huit viennent du latin et deux ont une origine celtique ou germanique ; cette langue, née des dissonnances nouvelles, des abréviations et des augmentations successives qu’amenèrent les rapports nouveaux des peuples, apparaissait à peine au ive siècle, mais était au commencement du ixe déjà très avancée dans les sermens de Louis-le-Germanique et des sujets de Charles-le-Chauve. Que cette langue romane (qui doit tant à M. Raynouard) ait été une langue perfectionnée, formée, fixée et qui a accompli ses phases, c’est là une précieuse découverte du savant illustre dont nous déplorons la perte. Mais la romane rustique fut-elle parlée dans tout le nord de l’Italie, dans une grande partie de l’Espagne, en France et jusqu’aux bords du Rhin ? a-t-elle donné naissance immédiate au catalan, à l’espagnol, au portugais, à l’italien, au français ? C’est ce qu’ont nié des hommes trop célèbres dans le monde savant, pour que nous n’en fassions pas au moins mention. On a demandé pourquoi cet intermédiaire dans la formation des langues néo-latines ? On a dit que tant d’uniformité dans la barbarie supposerait une méthode dont l’absence était indiquée par la corruption de l’ancienne langue. Le peu de place que M. Raynouard a accordé à l’influence germanique et celti-