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tant, comme une assise indestructible, la formule établie par M. Ampère. De même, nos neveux arriveraient-ils à connaître la cause de la pesanteur universelle, leurs études n’en repasseraient pas moins par la loi de Newton, et la nouvelle astronomie conserverait intactes, dans son sein, toutes les formules qui représentent les mouvemens des corps célestes. C’est ainsi que les théories mathématiques, contrairement aux systèmes philosophiques, sont choses permanentes et stables à toujours. Aussi M. Ampère, pour consoler Fourier des contrariétés qu’il éprouva, rappelait-il à l’illustre auteur de la théorie mathématique de la chaleur que ses formules n’avaient plus rien à craindre, même des progrès ultérieurs de la science, et qu’une connaissance plus intime des phénomènes du calorique y ajouterait sans en rien retrancher. C’est cette propriété des théories mathématiques qu’il faut bien concevoir : elles s’ajoutent les unes aux autres, elles ne se remplacent pas.

Il fallait un homme comme M. Ampère, imaginant les expériences et les méthodes de calcul, pour débrouiller des phénomènes aussi compliqués en apparence que les phénomènes électro-dynamiques, et arriver à une loi aussi simple que celle qu’il a trouvée. Sans lui, ils seraient encore dans une confusion inextricable ; la théorie en serait restée un dédale pour les physiciens, et par le fait c’est la plus difficile de toutes les théories. D’autres savans y avaient déjà échoué, et l’on peut juger, par leurs explications, quel conflit de théories, plus fausses les unes que les autres, auraient inondé la science sur cet objet.

Ce fut sans doute à cause de la profondeur de la loi qu’il avait découverte, et du genre de démonstration analytique qu’il employa, que M. Ampère éprouva tant de difficultés à la faire comprendre et admettre par les savans. Les physiciens français se montrèrent d’abord contraires, croyant que les idées théoriques de M. Ampère étaient opposées à la doctrine de Newton, d’après laquelle toutes les actions et réactions s’exercent suivant une ligne droite et jamais circulairement. Repoussé de toutes parts, ou plutôt mal écouté et mal compris, M. Ampère ne se décourageait pas ; il soumettait à Laplace tous ses calculs analytiques ; il prouvait aux géomètres que sa loi sur les attractions magnétiques et électriques rentrait dans le principe même de Newton, et que