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POÈTES ET ROMANCIERS ANGLAIS.

W. S*****n, où il raconte si plaisamment la querelle fort sérieuse des deux partis religieux de la Vieille et de la Jeune-Lumière.

Les vieille-lumière soutenaient que la lune était comme une chemise ou une paire de souliers, qui servait jusqu’à ce qu’elle fût usée, et qu’on remplaçait alors par une autre. Les jeune-lumière prétendaient, au contraire, que c’était toujours la même lune qui reparaissait rajeunie. Les vieille-lumière s’indignèrent que des blancs-becs voulussent en remontrer à leurs grands-parens. On affirma, on nia ; de proche en proche, on en vint aux coups ; les vieux, plus forts, bâtonnèrent les jeunes, et même en pendirent et brûlèrent quelques-uns pour leur apprendre à vivre. Enfin ce jeu commençait à se propager tant et si bien, que les seigneurs furent obligés d’intervenir, et de l’interdire par de sévères défenses. Le parti de la Jeune-Lumière avait été si maltraité, qu’on le croyait perdu sans ressource ; et voilà qu’aujourd’hui, chose étrange, il marche presque tête levée. La Vieille-Lumière ronge son frein et bout d’impatience, en voyant ainsi calomnier la lune. Mais, laissez faire, elle aura sa revanche avant peu ; quelques gros bonnets du parti doivent aller à la ville voisine prendre leur vol dans ce qu’ils appellent des ballons, et ils passeront un mois parmi les lunes, pour voir au juste ce qu’il en est. Lorsque la vieille lune sera sur le point de les quitter, ils en mettront un morceau dans leur poche, et quand les nouvelle-lumière le verront, il faudra bien qu’ils se prosternent.

Mais son cœur s’ouvre plus aux émotions douces et tendres ; la haine et le sarcasme n’y ont accès que par exception. C’est dans sa sensibilité que sa muse puise à chaque pas les plus touchantes inspirations. Tantôt c’est un lièvre blessé qui vient mourir à ses pieds ; tantôt c’est une poule d’eau qu’il effarouche en traversant Loch Turit, endroit sauvage dans les montagnes de Oughtertyre, ou une souris dont il a détruit le nid en conduisant sa charrue, ou une marguerite de montagne que le soc a tranchée, et l’on est tout surpris de se sentir ému au récit de telles infortunes.

L’amour de la patrie lui prête aussi de mâles accens. Écoutez le discours de Robert Bruce à son armée la veille de la bataille de Bannockburn, et dites-moi si dans la main du paysan écossais la cornemuse ne vaut pas un clairon.