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le rapprochent des singes ; il me suffira de faire remarquer que ces dernières ressemblances, quoique aussi nombreuses à peu près que celles dont il a été parlé plus haut, reposent en général sur des caractères moins importans, de sorte qu’en ayant égard seulement à l’organisation, il y aurait moins de distance de l’homme au pygmée que du pygmée au magot.

Je me suis arrêté peut-être un peu longuement sur ce sujet, et cependant je suis loin d’avoir donné une idée complète du travail de Tyson, travail qui a précédé de près d’un siècle celui de Camper sur l’orang de Borneo, et qui ne lui cède guère en importance. Il me reste maintenant à parler des observations que put faire le savant anglais sur les mœurs de l’animal pendant le peu de temps qu’il l’eut à sa disposition ; mais auparavant je dois rappeler ce qu’avaient dit quelques voyageurs dont notre auteur lui-même a pris soin de reproduire les récits.

Le premier, qui était un de ces aventuriers comme on en trouve tant dans le xvie siècle et le commencement du xviie, Battel, homme sans éducation, mais d’un sens assez droit, avait été d’abord chercher fortune en Amérique, et de là passa en Afrique, où il dut arriver vers l’année 1591. Il y resta dix-huit à vingt ans, faisant toutes sortes de métiers. Courtier, soldat, déserteur, il visita successivement presque tous les comptoirs européens, depuis le fond du golfe de Guinée jusqu’au cap Nègre, remonta plusieurs des grandes rivières qui ont leur embouchure sur cette partie de la côte, et pénétra, pour se dérober à la justice militaire des Portugais, dans les provinces de l’intérieur où les hommes blancs n’ont presque jamais eu accès. De retour en Angleterre, il entreprit, à la prière de Purchas, d’écrire une relation de son voyage, mais il mourut avant de l’avoir achevée. Ses papiers, cependant, furent remis à Purchas, qui en fit usage pour le second volume de sa collection de voyages. Le récit, quoique fort sec, n’est pas sans intérêt. Voici ce qu’on y trouve relativement au sujet qui nous occupe.

« Il y a, dit Battel, dans les forêts de Mayomba, au royaume de Loango, deux sortes de monstres, nommés pongo et enjecko. Le plus grand des deux, le pongo, est bâti comme un homme, mais sa taille est celle d’un géant. Il a le visage d’une créature humaine, des yeux enfoncés dans la tête et ombragés par de longs