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REVUE. — CHRONIQUE.

mort un remède à ses tourmens. Un prêtre rencontre Volberg fort à propos et relève avec indignation ses blasphèmes. Volberg ému, se résigne à vivre et assure au prêtre en le quittant, qu’il viendra le revoir. Il tient parole, et alors s’établit entre Volberg et le pasteur une controverse animée. Celui-ci réfute complaisamment toutes les attaques renouvelées de Voltaire et de l’encyclopédie, que Volberg dirige contre la bible et l’évangile. L’action est suspendue au milieu de ces doctes entretiens et on pourrait croire que le poème entier se réduit à un dialogue philosophique. Il n’en est pas ainsi pourtant, et les conversations de Volberg et du prêtre sont interrompues par l’arrivée de Noëmi. Cette jeune fille a été aimée de Volberg, qui l’a abandonnée après l’avoir séduite. L’amour a troublé son esprit et elle ne vit que dans l’espoir de revoir un jour celui qui l’a trahie. Volberg en retrouvant Noëmi sent son amour renaître, et il veut réparer sa faute. Noëmi revient à la raison dans les bras de son amant ; mais cette émotion trop vive a brisé son cœur, et au moment où le prêtre bénit le mariage de Noëmi et de Volberg, la jeune fille meurt en priant Dieu pour son époux. Volberg ne voit dans la perte de sa bien aimée qu’une raison pour nier devant le prêtre la bonté divine et pour maudire encore une fois la vie. Heureusement le prêtre ferme la bouche au sceptique en lui exposant le dogme de l’immortalité de l’ame. Volberg convaincu, se résigne et déclare, devant le lit de mort de Noëmi, que le doute est sorti pour jamais de son cœur.

Il est superflu de faire ressortir l’insignifiance de cette conception. Les parties du poème qui devaient être les plus développées, sont précisément celles que l’auteur a traitées avec une concision irréfléchie. Il n’a consacré que quelques pages au triomphe de l’amour et de la foi sur le doute, et s’est plu à développer sous toutes les formes l’antithèse du savant et du prêtre. A-t-il pu croire que les raisonnemens du pasteur étaient de force à convaincre Volberg et que cette controverse religieuse préparait le dénouement ? S’il en est ainsi, que n’a-t-il fait de Volberg un esprit humble et crédule ! On concevrait peut-être alors qu’il se rendît sans trop de peine à des explications sans valeur et sans portée ; mais un homme qui a sondé tous les systèmes, épuisé toutes les jouissances, un rêveur qui a vieilli avant l’âge dans la poursuite de ses chimères, orgueilleux comme Manfred, savant comme Faust, blasé comme don Juan, peut-il se laisser convaincre par un curé de village, qui lui traduit dans un langage sans pompe et sans énergie la prose du Génie du Christianisme ? On comprendrait le pouvoir qu’exerceraient sur une imagination jeune et tendre des preuves puisées à cette source poétique, mais Volberg devrait depuis long-temps avoir réfuté des raisonnemens aussi frivoles. Il n’a pas demandé inutilement le secret de son origine et de sa fin aux religions de l’Inde, de la Chaldée, de l’Égypte et de la Grèce, pour trouver une solution de cette énigme dans une démonstration poétique du christianisme. Quoi qu’en dise M. Pécontal, nous ne pouvons consentir à voir dans ce Volberg un nouveau Manfred ; c’est un écolier maladroit qui n’a de commun avec son maître que les rides du front et la tristesse du sourire. Mais pour peu qu’on le presse et qu’on lui expose un peu vivement des preuves insignifiantes, il reste interdit et trouve à peine dans sa mémoire les premiers mots d’une leçon mal étudiée.

L’erreur de M. Pécontal vient de ce qu’il n’a pas composé logiquement son œuvre ; Il ne s’est pas bien rendu compte de ce qu’il voulait démontrer.