et druz, ami. Chaque degré de l’échelle amoureuse avait son nom ; tout était disposé dans une symétrie parfaite ; c’était à la fois une science et un code.
Mais de ce que la galanterie chevaleresque a été plus complètement et plus régulièrement organisée dans le midi de la France, il ne faudrait pas en conclure que la chevalerie n’a existé et n’a fleuri que là ; comme je le disais, les différens pays de l’Europe y ont participé dans une inégale mesure. Ce fond commun cultivé par les influences provençales était antérieur à ces influences ; elles ne tardèrent pas à se propager dans la Catalogne, pays de langue provençale, puis dans la Castille. Mais l’Espagne était naturellement chevaleresque, elle l’est encore aujourd’hui plus qu’aucune contrée de l’Europe ; il y a dans toutes les classes en ce pays, depuis le grand jusqu’au paysan, quelque chose qui sent et rappelle la chevalerie. Au-delà des Pyrénées, tout le monde est noble, et la raison en est dans l’histoire ; il n’y a pas dans le passé des vaincus et des vainqueurs, tous ont vaincu ensemble, tous ont reconquis l’Espagne sur les Maures, chacun a pris part à ce grand tournoi de sept siècles, qui a fini sous les murs de Grenade. La chevalerie mauresque, moins grandiose, mais plus élégante que la chevalerie castillane, a aussi laissé une empreinte sur les mœurs et le caractère espagnol. Le nord de l’Italie fut ouvert de bonne heure aux influences provençales : portée en Sicile par les Normands, la chevalerie y fleurit, surtout sous la maison de Souabe ; cette maison venait des pays qui, en Allemagne, étaient le centre, le foyer de la vie chevaleresque. On voit, dans la chronique d’Ottocar de Hornek, ces mœurs chevaleresques des Souabes aux prises avec la barbarie des Hongrois. Rien n’est plus curieux que l’étonnement de ces bons Souabes en présence d’un ennemi qui n’entend pas la chevalerie ; les Hongrois sont des Huns qui sortent d’Asie, qui arrivent avec leurs grands arcs, leurs longues flèches ; les chevaliers allemands, peu accoutumés à cette manière de guerroyer, qui n’est pas selon les règles, font prier les Hongrois, au nom des dames, de combattre plus civilement, l’épée à la main, d’après la coutume de Souabe : les Hongrois répondent en perçant de flèches les parlementaires et les autres chevaliers.
L’Angleterre a toujours été plus aristocratique que chevaleresque ; dans les siècles qui suivent la conquête, la chevalerie n’y a qu’un représentant fort incomplet, Richard Cœur-de-Lion, et encore, par sa poésie provençale ou française, il tient aux troubadours et aux trouvères, et par eux à la France. À la fin du moyen-âge, Édouard III