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EXPÉDITION DE CONSTANTINE.

attendre, pour remédier à cet inconvénient, que l’expérience eût changé la chance en fait, il fut résolu que, dès la nuit suivante, on s’occuperait de la construction d’une nouvelle batterie de brèche établie dans des conditions qui ne permissent aucun doute sur son efficacité. L’emplacement que l’on choisit était situé à environ 150 mètres de la place, et sur le prolongement de l’axe de l’ancienne batterie, mais sur un plan fort inférieur. À droite prenait un étroit ravin qui, déchirant la berge de la rivière, passe contre la petite enceinte qu’occupait le 47e, et débouche près du grand bâtiment en ruines ; à gauche était l’échappée qui s’ouvre entre le talon du contrefort supérieur de Kodiat-Aty et les murs de la ville, en sorte qu’aucun obstacle naturel ne devait garantir la batterie de ce côté. Il fut convenu que le génie fermerait par un épaulement la trouée qui existerait entre cette extrémité de notre nouvelle ligne d’ouvrages et le massif de Kodiat-Aty, et qu’il profiterait de l’espèce de chemin couvert que formait le ravin, pour établir une place d’armes où nos troupes pussent être réunies en sûreté pour protéger le travail, plus tard défendre les pièces, et enfin se préparer à l’assaut. Il y avait peu à ajouter aux dispositions naturelles des lieux pour atteindre les conditions demandées ; car le long de cette communication, telle que les eaux nous l’avaient faite, règne, du côté de la place, un talus dont le relief, presque partout, suffisait à couvrir un homme. Sur un point seulement cette continuité était rompue par une dépression, que l’on raccorda facilement au niveau général avec quelques sacs à terre. C’était un heureux hasard que l’existence, dans cette direction, d’une voie encaissée et dans laquelle on pût cheminer sans danger entre notre grand poste inférieur sur le bord de la rivière, et le point convenable pour l’établissement d’une batterie. Sans ce secours, qui nous venait du terrain, il aurait fallu peut-être renoncer à porter plus près de leur but les pièces de siége ; car cette opération eût entraîné la nécessité de créer une tranchée, travail pour lequel le temps manquait. Puisque l’on se préparait à se rapprocher de la place et à exciter, par un feu plus menaçant et plus destructeur, les efforts de l’artillerie ennemie, il fallait tout disposer pour balayer promptement les remparts des pièces qui, tenues en réserve pour les cas extrêmes, allaient reprendre leur poste, ou qui, démontées dans la première lutte, avaient été rétablies et remises en état de rentrer en lice. On détermina donc l’emplacement de trois nouvelles batteries sur Kodiat-Aty, deux en arrière de la première batterie de brèche, l’une à gauche et verticalement au-dessus de celle-ci, sur une petite plate-forme soutenue par des murs de terrasse. Les pièces nécessaires à l’exécution de ce nouveau plan furent prises aux anciennes batteries du Mansoura, lesquelles furent désarmées, à l’exception de celle qui occupait l’extrême gauche de la position, et qui continua, avec son canon de 24 et ses gros obusiers, à enfiler le front d’attaque.

Dès que l’idée de ces divers changemens fut arrêtée, on mit la main à l’œuvre pour l’exécution. Des détachemens furent envoyés dans le petit ravin servant de tranchée pour y apprêter des sacs à terre ; car, à portée du lieu du