préférence au point de se refuser absolument à assurer, à quelque prix que ce soit, les marchandises qui vont par le plus grand nombre des autres bateaux.
Le mode de transport que fournissent aux voyageurs les bateaux à vapeur, tels qu’on sait les construire aujourd’hui, est donc à la fois sûr et rapide. Il est également agréable et commode ; le mouvement des bateaux est doux ; au lieu d’être entassés, courbés et doublés dans des caisses de voitures, les voyageurs ont la faculté d’aller et venir, de lire s’il leur plaît, ou s’ils l’aiment mieux, de contempler les sites pittoresques distribués avec profusion en tout pays sur les bords des fleuves et qui défilent sous leurs yeux. C’est le système de viabilité dont, dans beaucoup de cas, on peut doter un pays avec les moindres frais, car, en Europe, les chemins de fer sont estimés habituellement dans les devis d’avant-projet à 1 million par lieue, et coûtent en réalité de 1,500,000 fr. à 2,000,000. Les canaux ordinaires exigent, dans la plupart des cas, de 4 à 600,000 fr. par lieue. La dépense des nôtres s’est élevée moyennement à un peu plus de 500,000 fr. Au contraire, il y a plusieurs rivières en France qui pourraient être rendues praticables aux bateaux à vapeur, pendant onze mois sur douze, moyennant une dépense de 150 à 200 mille fr. par lieue.
Enfin le voyage y serait à un prix inférieur à celui que peuvent offrir tous les autres moyens de communication. Supposons que nos rivières cessent d’être réduites d’espace en espace sur les bancs de sable qui les barrent, à une profondeur d’eau de 18 pouces pendant l’été, et soient rendues constamment praticables pour des bateaux plongeant de quatre pieds ou seulement de trois ; alors, au lieu des 60 ou 80 passagers qui suffisent à combler des bateaux tels que ceux dont on se sert actuellement sur la Loire, parce qu’ils ne peuvent caler que 10 pouces à 1 pied, les bateaux à vapeur pourraient recevoir 3 ou 400 personnes. En Amérique, sur des fleuves où l’on peut se donner un tirant d’eau de 4 à 6 pieds, 6 à 800 personnes sont quelquefois rangées à l’aise à bord du même bateau. Les frais de transport étant en grande partie les mêmes, quel que soit le chargement, il en résulte que lorsque le nombre des voyageurs est considérable, le prix des places peut être fixé à un taux extrêmement bas. Ainsi, entre New-York et Albany, sur des bateaux meublés et équipés avec le plus grand luxe, et courant à raison de 6 lieues à l’heure, j’ai vu le prix du passage aux premières places, ou plutôt aux seules places qu’il y ait sur cette terre d’égalité, tomber par degrés à 50 cents (2 fr. 65 c.) et y rester défi-